Deux documentaires reviennent sur l'histoire de l'hebdomadaire satirique et surtout son importance. Le Rire en éclats replace Charlie Hebdo dans le contexte des époques que le journal a traversées. Le film raconte les soubresauts de l'histoire de Charlie, le premier dépôt de bilan, l'épisode des caricatures en 2006, l'incendie des locaux en 2011, mais, surtout, il nous rappelle l'importance du rire dans notre société. Et le danger de le voir disparaître au nom d'une morale qui tient plutôt du renoncement. «On ne se force pas à Charlie, on est comme ça»,raconte Cabu lors d'une conférence de rédaction qui ouvre le film. Mais ils ont beau être comme ça, ils ont entre les mains une arme redoutable : la caricature.
«C'est le sommet de l'art démocratique, rappelle l'historien Marcel Gauchet, un des nombreux brillants intervenants de ce documentaire. Elle suppose une capacité d'autodérision et d'accepter des opinions qui vous sont contraires.» Et la défense de cette liberté ne supporte pas l'approximation. «Dire "je suis pour la liberté mais" , c'est de la lâcheté avec les contours de la pondération, explique le philosophe Raphaël Enthoven. C'est une démission maquillée.» Ce documentaire tisse une toile à la fois philosophique et historique de la satire dans le monde d'aujourd'hui. Et montre comment Charlie Hebdo s'est retrouvé en première ligne en notre nom à tous.
En complément, Charlie 712 est une plongée dans l'histoire d'un numéro de l'hebdomadaire qui a changé l'histoire. La sienne. La nôtre. En février 2006, Jérôme Lambert et Philippe Picard tournent un portrait de Cabu. Le hasard fait que le tournage se passe au moment où le journal s'apprête à publier les caricatures de Mahomet qui ont mis le feu au monde musulman. Les images, qu'ils avaient peu utilisées à l'époque, sont devenues des documents historiques. Pas de voix-off, on suit juste la conférence de rédaction et le bouclage. Des hommes et des femmes qui se marrent autant qu'ils ont conscience de défendre quelque chose d'essentiel. Et cette petite phrase de Wolinski qui va résonner longtemps à nos oreilles : «On a de la chance, la France est un paradis, c'est le seul pays où il peut y avoir un Charlie Hebdo.»