Surprise : deux nouvelles exceptions au droit d'auteur, qui figuraient dans des «versions de travail» de la loi portée par Axelle Lemaire, la secrétaire d'Etat en charge du numérique, mais en avaient été écartées au fil des arbitrages interministériels, ont été adoptées ce jeudi matin par les députés, lors de la troisième journée de l'examen du texte à l'Assemblée nationale.
La première, la «liberté de panorama», autorise la reproduction d'œuvres – sculptures, bâtiments... – couvertes par un droit de propriété intellectuelle qui sont placées dans l'espace public. Prévue par une directive européenne de 2001, elle existe en Grande-Bretagne ou en Allemagne, mais pas en France. La liberté de panorama s'appliquerait désormais aux «reproductions et représentations» réalisées «par des particuliers à des fins non lucratives», quand les œuvres sont «en permanence» dans l'espace public. Une rédaction qui ne satisfait pas les partisans d'un droit plus large – et pour cause, elle risque fort de laisser Wikipédia sur le bord du chemin – mais qui ouvre déjà la porte à une vague de selfies devant le viaduc de Millau, les immeubles de Le Corbusier... ou la tour Eiffel de nuit.
La seconde exception concerne la fouille automatisée de textes et de données (text and data mining), une demande récurrente des chercheurs. Selon l'amendement adopté – contre l'avis du rapporteur Luc Belot et celui du gouvernement –, les reproductions numériques d'œuvres couvertes par le droit d'auteur seraient possibles «en vue de l'exploration de textes et de données pour les besoins de la recherche publique, à l'exclusion de toute finalité commerciale». L'embellie pourrait néanmoins être de courte durée, la députée d'Ille-et-Vilaine Marie-Anne Chapdelaine ayant fait valoir que certains députés socialistes n'avaient pas eu la présence d'esprit de voter à temps... L'amendement sera donc revoté à l'issue de la séance, probablement fort tard.
Pas de succès, en revanche, pour les parlementaires qui souhaitaient inscrire dans la loi la reconnaissance du domaine public et des «biens communs» numériques. A l'issue d'un débat vif et nourri, tous les amendements en ce sens ont été rejetés.