Le studio finlandais SuperCell est, aux côtés de King (Candy Crush Saga et ses dérivés) un des piliers du jeu mobile. Avec Clash of Clans, sorti en 2012, ils ont conquis des millions de joueurs et lancé une mode qui a vu apparaître les clones par wagons entiers (Sparta, Forge of Empire…). Clash of Clans est un jeu free to play, c'est-à-dire qu'il est gratuit à télécharger, mais ne cesse ensuite de tout faire pour atteindre le porte-monnaie des joueurs en proposant notamment des moyens payants de devenir plus fort plus vite. Le but est ainsi de construire son château en y disposant des défenses et des bâtiments qui produisent ressources et troupes. On peut ensuite attaquer avec son armée les châteaux d'autres joueurs et se faire attaquer soi-même, qu'on soit connecté ou non. A terme, le but est de rejoindre un clan et d'affronter ainsi d'autres groupes de joueurs dans un système spécifique de batailles. En résumé : c'est addictif et sans grand intérêt. Mais ça marche, car le joueur, une fois accroché, ne peut s'empêcher d'y retourner tous les jours pour améliorer sa petite bourgade. Le succès est tel qu'on estime les revenus de SuperCell à plus de 1,5 million de dollars (1,4 millions d'euros) par jour. De quoi financer les campagnes de pubs télé qu'on croise régulièrement sur nos écrans.
En 2014, le studio tente le doublé avec Boom Beach, basé sur le même principe général. Ce qui le rend sans doute tout aussi intéressant (on avoue, on n'a pas eu le courage d'essayer), et le succès, bien que non négligeable, le situe à des années-lumière de son prédécesseur. Quand on a appris il y a deux jours, au détour d'un tweet, que SuperCell venait de lancer son nouveau jeu, autant dire qu'on n'en espérait pas grand-chose. A tort.
Clash Royale est lui aussi un jeu free to play, mais il n'a rien à voir avec ses aînés. Il s'agit d'un jeu d'affrontement en temps réel entre deux joueurs. Le but est de détruire les trois tourelles de l'adversaire en lui envoyant des troupes depuis son propre territoire, tout en protégeant ses propres bâtiments. Chaque partie dure au maximum trois minutes, et au bout du temps réglementaire, celui qui a détruit le plus de bâtiments a gagné. En cas d'égalité, on entre en phase de mort subite, et c'est le premier qui détruit une tour qui remporte le match. C'est dynamique, assez tactique, et si on ajoute l'aspect collection, la recette semble parfaite.
Car avant chaque partie, le joueur doit choisir huit cartes parmi sa collection qui seront jouables. Chaque carte correspond à un type d'unité, un sort ou un bâtiment. Et il faut débloquer et améliorer ses unités en ouvrant des coffres qui sont gagnés après chaque combat ou régulièrement «offerts» par le jeu. Et c'est là que se situe le modèle économique de Clash Royale : les coffres gagnés ne s'ouvrent qu'au bout d'une période d'attente qui va de trois à douze heures. Et pour aller plus vite, on peut dépenser des gemmes que l'on ne récupère qu'au compte-gouttes. A moins bien sûr de payer (un euro pour 80 gemmes qui permettront de gagner environ douze heures d'attente). C'est malin, car les joueurs pressés n'y résisteront pas, alors que ceux qui auront un peu de patience n'auront rien à payer et conserveront une expérience de jeu intacte (on ne rencontre que des adversaires qui correspondent à son propre niveau).
SuperCell réussit donc la performance de proposer un «vrai» jeu sur un modèle free to play. Ce n'est pas une première, bien sûr – des titres comme Hearthstone ou League of Legends ont déjà prouvé que le modèle pouvait fonctionner avec de bonnes propositions ludiques – mais venant d'un studio qui a forgé son succès sur des mécaniques addictives sans intérêt, la surprise est agréable. Et là où Clash Royale réussit à se démarquer, c'est sur la durée de ses parties. On a si souvent trois minutes à tuer. Voici leur assassin.
Clash Royale, SuperCell, à télécharger gratuitement sur iOS et Android.