Fripes, meubles, objets de récup et même produits high-tech, le bric-à-brac d'Emmaüs sera bientôt accessible en ligne. L'organisation humanitaire fondée en 1934 par l'abbé Pierre, pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion, se lance dans le e-commerce : elle ouvrira son propre site marchand à l'automne, a-t-elle annoncé lors du Salon Emmaüs qui se tenait le week-end dernier, porte de la Vilette, à Paris. Avec ses 350 espaces de vente qui quadrillent l'Hexagone et son chiffre d'affaires de 500 millions d'euros par an, le réseau Emmaüs a de quoi venir chatouiller les champions de la revente d'objets sur Internet, Amazon et Le Bon Coin. Maud Sarda, chef du projet, affirme qu'Emmaüs ne compte cependant pas concurrencer directement ces géants de la vente sur Internet. L'organisation souhaite plutôt de proposer «une alternative solidaire aux sites marchands classiques pour des acheteurs soucieux de consommer responsable». L'association ne faillira pas à ses principes ; les objets mis en ligne par les compagnons seront toujours issus de dons de particuliers, et les recettes entièrement reversées à l'association.
Les ambitions d'Emmaüs dépassent largement l’idée d’une simple boutique en ligne. La structure de Label-Emmaüs prend la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif dont la gouvernance partagée permet de conjuguer une activité économique à une finalité sociale en intégrant toutes les parties prenantes : salariés, vendeurs, partenaires économiques et institutionnels, particuliers sympathisants et acheteurs solidaires. Thierry Kuhn, le président d’Emmaüs, espère que l’association réalisera 10% de son chiffre d’affaires dans la vente en ligne d’ici deux à trois ans. Un objectif que l’association ne devrait pas avoir de mal à atteindre, si l’on en croit le succès des premières expérimentations à Vannes, Forbach et Toulouse en 2015. Dans cette dernière ville, le site atteint déjà les 300 000 visites.
Elargir et diversifier la clientèle d’Emmaüs
Si l’association mise sur le Web, c’est avant tout pour séduire de nouveaux acheteurs, plus jeunes et plus connectés. Et les premiers retours sont plutôt bons sur les réseaux sociaux : les blogueurs mode s’enthousiasment déjà de l’arrivée du site.
Mais le lancement de cette e-boutique n'a pas pour objectif de diminuer la fréquentation des points de vente des compagnons, bien au contraire. Emmaüs employant de nombreuses personnes en réinsertion sociale, il est essentiel pour l'association de préserver le contact humain. L'organisation prévoit notamment la création d'une centaine d'emplois supplémentaires pour assurer la préparation des commandes et le retrait en boutique. « Les compagnons seront équipés de tablettes et bénéficieront d'une formation pour mettre en ligne les annonces», précise Maud Sarda.
En outre, la livraison sera une option payante, afin d'inciter le consommateur à se rendre sur place pour retirer ses achats. «L'idée c'est de faire découvrir Emmaüs à des gens qui n'en connaissent pas bien le fonctionnement ou qui auraient quelques réticences à s'y rendre, poursuit Maud Sarda, on cherche avant tout à faire tomber des préjugés.» Le décompte est déjà lancé sur la page d'accueil du site, dont les couleurs vives, les slogans accrocheurs et les hashtags amusants cherchent à dépoussiérer l'image de l'association centenaire.