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Libération
Edito

Fessenheim : l’exécutif expert ès procrastination

Un ouvrier photographié sur le site de la centrale de Fessenheim, lors d'une visite de presse, le 9 avril 2013. (Photo Sebastien Bozon. AFP)
publié le 15 juin 2016 à 19h21

C'est entendu depuis un moment, la promesse de François Hollande de fermer la centrale nucléaire de Fessenheim avant la fin de son mandat ne sera pas tenue. Mais voilà que même le lancement du processus juridique conduisant à sa fermeture risque de traîner jusqu'à au moins fin 2016, si l'on en croit le Monde, qui évoque un «bras de fer» entre le PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy, et sa ministre de tutelle, Ségolène Royal. Celle-ci réclame que l'électricien dépose avant fin juin une demande d'abrogation de l'autorisation d'exploiter la plus vieille centrale française. Or, côté EDF, on confirme à Libération qu'il est «juridiquement difficile de déposer cette demande tant qu'il n'y a pas de montant défini pour l'indemnisation», jurant toutefois qu'il n'y a «aucune volonté de ralentir quoi que ce soit».

EDF espérerait recevoir au moins de 2 à 3 milliards d'euros, tandis que Royal propose au maximum 100 millions. Difficile de se mettre d'accord en trois semaines. Mais si «l'Etat n'a pas les moyens juridiques de fermer un réacteur», rappelle l'avocat Arnaud Gossement, il pourrait très bien, en tant qu'actionnaire principal, mettre la pression sur EDF. Le fait-il vraiment ? Rien n'est moins sûr.

Tout prouve que l'exécutif n'a en fait aucune envie de fermer Fessenheim. Depuis 2012, il n'a cessé de procrastiner. Comme il l'a fait pour sortir sa loi de transition énergétique, qui contient un autre engagement présidentiel, réduire à 50 % la part de l'atome dans la production d'électricité d'ici à 2025. Et comme il le fait désormais pour appliquer cette loi : il manque toujours un texte clé, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), pour détailler comment l'Etat compte atteindre cet objectif de 50 %. Selon la Cour des comptes, cela impliquerait de fermer de 17 à 20 réacteurs sur 58. S'il est si ardu de régler la question des deux réacteurs alsaciens, comment croire que cette PPE sera publiée avant le 1er juillet, comme le promet Royal ? Parions que la patate chaude - et de plus en plus chère -du nucléaire sera refilée à la prochaine majorité.