«Avec le phantom, la France montre qu'elle est capable d'être première dans le domaine de l'audio, ici, en Seine-et-Marne, j'en suis très heureux». En déplacement au Châtelet-en-Brie dans l'usine de production de Devialet, le fabricant de cette enceinte ultra-haut de gamme, François Hollande n'a pas boudé son plaisir devant ce qu'il a qualifié de «merveille technologique». Une visite spécialement calibrée pour le jour de la fête de la musique afin de lui permettre de mettre en avant la French tech, mais aussi le secteur de la musique qui fait vivre 5000 personnes en France.
Après avoir visité cette usine ultra-moderne et très robotisée grâce à un équipement de bras articulés 100% japonais, le président s'est fait l'attaché de presse de cette start-up au tour de table très people (Xavier Niel, Bernard Arnault, Francois Pinault et Marc Simoncini comptent parmi ses 140 actionnaires) qui lui a donné l'occasion de montrer l'étendue de sa culture musicale. «Le nom phantom, c'est pour Phantom of The paradise?», s'est-il risqué durant la visite aussi studieuse que technique durant laquelle il n'a presque pas bronché. «Oui et pour tout le reste, le fantôme de l'opéra, la Rolls-Royce phantom lui a répliqué un de ses guides, c'est très international comme nom et c'est la raison pour laquelle nous l'avons choisi.»
Un président VRP
Reprenant le dossier de presse de Devialet, le président a souligné le fait que le phantom était distribué dans l'ensemble des Apple store américains et en Europe. Il a aussi fait de l'humour typiquement hollandien en déclarant qu'il aimerait encore être là en 2020 pour voir les 3 000 emplois que la société ambitionne d'avoir créé d'ici-là, contre environ 200 aujourd'hui. «Ça ira vraiment mieux à cette époque là», a-t-il ajouté en vantant le fait que Devialet avait multiplié par trois son chiffre d'affaires en 2015 et exporte 85% d'une production 100% made in France. Un discours parfaitement huilé de VRP de l'industrie française.
Après avoir écouté Pierre-Emmanuel Calmel, un des créateurs de Devialet et son ingénieur en chef, vanté le crédit impôt recherche et la qualité d'ingénieurs français dont la réputation n'est plus à démontrer dans la Silicon Valley, François Hollande s'est félicité de la reconversion d'un site industriel situé en pleine campagne et totalement à l'arrêt il y a deux ans. «On nous dit qu'on paie plus d'impôt en France qu'ailleurs, ce qui n'est pas tout à fait vrai, a encore affirmé le chef de l'Etat, mais ce n'est pas ici le débat. Ce qui compte, c'est qu'avec le CICE, le crédit impôt recherche ou le statut de jeune entreprise innovante, on est en mesure de créer des emplois, ici, en France et c'est une belle leçon de voir que Devialet, ce n'est pas seulement un relais de croissance ou une technologie merveilleuse, mais aussi un beau produit fabriqué par des salariés qui participent à l'aventure.» Le message, martelé par Devialet et repris grâcieusement par François Hollande, est clair: la technologie n'amène pas seulement des emplois ultra-qualifiés mais est également de nature à revivifier des métiers ouvriers (controle qualité, soudure et polissage, etc.) indispensables à la production de ces enceintes connectées.
L’interim plutôt que le CDI
«C'est la cambrousse Valley ici», commentait le député UDI de la circonscription Yves Jego, chantre du «produire en France» dont il organise des assises annuelles et ravi de ce coup de projecteur présidentiel sur un bassin industriel qui emploie majoritairement des ouvriers et techniciens. «C'est la preuve que le savoir faire technologique français ce n'est pas qu'une affaire d'ingénieurs high-tech mais aussi d'emplois ouvriers.» Dans cette usine dédiée à la production des hauts-parleurs du Phantom - dont sort ces jours-ci la nouvelle version enrichie «Gold phantom» (2500 euros l'unité tout de même) - une cinquantaine d'emplois ouvriers ont été créés sur les 200 que compte la société. Mais ce sont presque tous des intérimaires et seuls cinq d'entre eux ont été embauchés en CDI à ce jour. «Ils préfèrent nous garder en intérim, dit l'un d'eux, résultat on n'a pas complètement l'impression de faire partie de la société alors que c'est le cas pour les stagiaires là depuis une semaine.»
Après la traditionnelle tournée de selfies à laquelle il s'est prêté de bonne grâce, François Hollande s'est éclipsé tout sourire tandis qu'un phantom diffusait la Vie en rose. Une visite parfaitement orchestrée et sans histoire au pays de la France qui gagne et de l'économie heureuse, loin de la contestation de la rue et des débats de la loi El Khomri.