Heinrich W., 75 ans, est venu décharger sa frustration. Mercredi, il est l'un des premiers à pénétrer dans le hangar 2 de la Foire de Hanovre, où se tient l'assemblée générale de Volkswagen. Pour la première fois depuis le scandale des moteurs diesels truqués, en septembre dernier, la direction et le conseil de surveillance du géant automobile affrontent la foule des quelque 3 000 petits actionnaires. Ils ne détiennent ensemble que 11 % des droits de vote, le reste se répartissant entre les familles Porsche et Piëch (52 %), le Land de Basse-Saxe (20 %) et l'émirat du Qatar (17 %). Mais ils sont en colère. Volkswagen pèse aujourd'hui en Bourse 23 % de moins qu'en septembre 2015. Heinrich W. «a perdu pas mal d'argent» et se moque bien des excuses présentées par le nouveau président du directoire, Matthias Müller, qui considère que le scandale «a d'une certaine façon été salutaire» pour le groupe.
D'ici à 2025, un tiers des nouveaux véhicules devront être équipés d'un moteur électrique ou hybride. En attendant, des économies de 8 milliards d'euros par an seront nécessaires pour pallier les pertes. «On a affaire à de la criminalité économique de la pire sorte, peste Heinrich W. Et qu'est-ce qui se passe ? Rien ! Le directoire et le conseil de surveillance sont toujours en place ! Ils ont quasiment supprimé les dividendes mais se sont accordé de juteuses primes !» Mercredi, il s'est joint à une plainte collective de propriétaires allemands de véhicules truqués et à une autre des petits actionnaires. Il a aussi voté contre le quitus à la direction, qui soutient toujours qu'un petit groupe d'ingénieurs aurait agi à son insu pour masquer son incapacité à respecter les normes d'émissions. A la tribune, les intervenants exigent une enquête indépendante et s'indignent de la promotion à la tête du conseil de surveillance de l'ex-directeur financier du groupe : «Vous qui êtes coresponsable du scandale êtes maintenant dans la position d'empêcher que toute la lumière soit faite sur cette affaire.»