Dans le communiqué annonçant, ce mardi, ses résultats financiers du premier semestre, SFR évoque à la première ligne «une exécution solide dans un environnement difficile». Typique de la novlangue comptable des grandes entreprises, la formule est délicate mais ne doit pas tromper : elle signifie que l'opérateur télécoms, détenu par le groupe Altice de Patrick Drahi (également propriétaire de Libération via la filiale SFR Média) depuis novembre 2014, est loin, très loin d'avoir tout cassé lors des six premiers mois de l'année.
Sur un an, les principaux indicateurs économiques sont en baisse. Le chiffre d'affaires (5,3 milliards d'euros) perd 4,1%. L'Ebitda (1,8 milliard d'euros), qui mesure la rentabilité de la boîte et est davantage observé dans le secteur que le résultat net (84 millions d'euros de déficit), plonge de 7,6%. De même, la marge tombe d'un point, à 35%, alors que Drahi a l'objectif de la remonter à 45% à «moyen terme». Enfin, les clients continuent d'aller voir ailleurs : en un an, l'entreprise en a perdu 861 000 dans le mobile et 167 000 dans le fixe. «La décroissance du chiffre d'affaires est principalement liée à la perte d'abonnés sur un an dans l'ensemble des divisions grand public, entreprises et opérateurs», explique SFR.
«Guerre d’abonnés»
Catastrophe, donc ? A regarder l'évolution du cours de la Bourse ce mardi, pas du tout. A 13 heures, le titre de SFR, qui a perdu plus de la moitié de sa valeur depuis un an, bondissait de 10%. Déjà rassurés par l'annonce récente de la suppression de 5 000 postes dans l'entreprise, soit un tiers des effectifs (un plan signé par les syndicats majoritaires, qui va permettre à la société d'économiser 400 millions d'euros par an à partir de 2018), les marchés semblent paradoxalement requinqués par ces résultats mitigés. «Bien sûr, tout n'est pas au vert, fait-on remarquer du côté de SFR. Mais nous sommes dans une guerre d'abonnés totale avec les autres opérateurs, et les recrutements coûtent parfois plus qu'ils ne rapportent à ceux qui les font. Il ne faut pas se focaliser sur le nombre de clients. Nos fondamentaux sont bons.»
Sur un marché ultraconcurrentiel où SFR, Orange, Bouygues Telecom et Free rivalisent à coups de promotions, les investisseurs apprécient sans doute que l’opérateur au carré rouge parvienne encore à faire grimper ses prix. Au deuxième trimestre 2016, le revenu moyen par abonné a progressé dans le fixe (40,8 euros) et dans le mobile (22,3 euros) par rapport au premier trimestre. En clair, SFR a moins de clients mais chacun d’entre eux rapporte un peu plus d’argent. A la Bourse, on adore ce genre d’équation. L’autre point positif des résultats est l’augmentation des investissements (1 milliard d’euros), qui ont crû de 23% au premier semestre sur un an. Affaibli par une mauvaise qualité de service depuis deux ans, SFR semble enfin avoir compris qu’il avait intérêt à mettre un peu d’argent dans les réseaux pour conserver ses abonnés. Là aussi, les marchés valident la dépense.
Chaîne de sport
Les jours à venir sont très importants pour le SFR version Drahi. Le 13 août, l'opérateur lance une nouvelle chaîne de sport, SFR Sport 1, dédiée à la diffusion de la Premier League, le championnat de foot anglais dont il a acquis les droits de retransmission pour trois ans au détriment de Canal+. En l'état, accessible seulement à certains abonnés des offres fixe et mobile de SFR, cette antenne est l'élément clé de sa stratégie de convergence entre tuyaux et contenus, qui vise à recruter des nouveaux abonnés à des prix un peu plus élevés. De quoi gagner sur tous les tableaux et mettre fin à la décroissance générale.