Menu
Libération
Droit de suite

Le bras de fer sur le prix du lait continue entre Lactalis et les producteurs

Malgré une nuit de négociations, aucun accord n'a pu être trouvé entre les organisations de producteurs et le géant du lait. Lactalis propose d'acheter la tonne de lait 15 euros plus cher : toujours insuffisant pour vivre, jugent les éleveurs.
Lactalis est dans la ligne de mire des producteurs de lait qui reprochent au groupe de ne pas les payer au prix «juste». (Photo Jean-François Monier. AFP)
publié le 26 août 2016 à 11h27

Pas d'accord sur le prix du lait. Après onze heures d'âpres négociations qui se sont prolongées jusqu'au milieu de la nuit dernière à la Maison du Lait à Paris, en présence d'un médiateur, le groupe Lactalis et les organisations de producteurs ne sont pas parvenus à s'entendre. «Nous n'avons pas pu accepter la dernière proposition du médiateur qui était de 280 euros les mille litres pour les derniers mois de l'année», a indiqué Florent Renaudier, président de la section laitière de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) de la Mayenne et membre d'une organisation de producteurs.

Manifestement éprouvé par les discussions, celui-ci a également mis en doute une réelle volonté d'aboutir de la part de Lactalis. «Je ne suis pas sûr qu'ils aient pris conscience de ce qu'on vit aujourd'hui», estime-t-il. Le ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll qui présentera mardi aux professionnels du secteur laitier le plan de régulation de la production française demandé par la Commission européenne en juillet a pour sa part appelé les parties prenantes à «reprendre au plus vite les négociations». Le prix payé aux producteurs par Lactalis ne peut pas «demeurer le plus faible du marché», a-t-il ajouté.

Lactalis fustige une «attitude irresponsable»

De son côté, le géant des produits laitiers a dénoncé «l'attitude irresponsable de la FNSEA» et fait savoir dans un communiqué qu'il avait souhaité en vain «faire un effort supplémentaire» en proposant une augmentation du prix du lait de 15 euros les mille litres à partir du premier septembre, ce qui le porterait à 272 euros, le prix payé actuellement atteignant à peine 257 euros. Insuffisant pour les éleveurs qui réclament toujours un prix minimum "au-dessus de 300 euros pour la fin de l'année", comme l'a réaffirmé Franck Guéhennec, président de la Fédération départementale des exploitants agricoles (FDSEA) de Mayenne qui met en garde ses adhérents sur Twitter: «Ne vous faites pas avoir. Ce n'est que de la com. Lactalis est un pro de la com».

Lactalis a également fustigé le comportement de la FNSEA, des Jeunes agriculteurs et de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL).«En dépit de leurs déclarations, ces organisations syndicales n'ont pas agi pour s'engager dans une sortie de crise, mais pour prolonger des actions et un bras de fer médiatique avec le groupe Lactalis et nuire à son image», dénonce l'industriel.

300 tracteurs et plus de 1 000 manifestants

A Laval, où le siège de Lactalis fait l'objet d'un blocus des producteurs depuis lundi, la mobilisation est montée d'un cran jeudi soir avec la présence d'environ 300 tracteurs et de quelque mille manifestants venus du grand ouest. Ces derniers ont envahi le rond-point, rebaptisé «rond-point de la honte», qui commande les accès à Lactalis et se sont montrés déterminés à prolonger leur action le temps qu'il faudra.

«On ne partira pas d'ici tant qu'on n'aura pas un accord qui permette aux éleveurs de vivre décemment, affirme Philippe Jéhan, président de la FDSEA de la Mayenne. On n'a rien contre Lactalis, on veut seulement qu'il paye les éleveurs à la hauteur de leur travail.» Des tours de garde ont été d'ores et déjà organisés à Laval afin de poursuivre le blocus au moins jusqu'à lundi. Lactalis demande pour sa part l'évacuation du rond-point où sont installés les agriculteurs, rapporte France Bleu Mayenne, qui précise qu'un référé en ce sens sera examiné à 14 heures par la justice.

Le   18 juillet dernier, la Commission européenne avait annoncé une enveloppe de 500 millions d’euros pour soutenir le monde agricole, dont 150 millions pour inciter à réduire la production de lait, actuellement en surproduction au niveau mondial avec pour conséquence un effondrement des cours depuis 2015.