Menu
Libération
Boum

SpaceX : les dommages collatéraux de l’explosion pour Israël

Le satellite Amos 6, désintégré lors de l’accident de jeudi à Cap Canaveral, était le plus perfectionné jamais développé par l’industrie aéronautique israélienne.
Capture écran extraite d'une vidéo de l'explosion, jeudi, du Falcon9, à Cap Canaveral (Floride, Etats-Unis). (Photo Reuters)
publié le 2 septembre 2016 à 15h54

Abattement, malaise et grincements de dents. Sous le choc, les dirigeants de l’Agence aérospatiale israélienne attendent toujours de recevoir des explications circonstanciées après l’explosion, jeudi, à Cap Canaveral (Floride), de la fusée américaine Falcon 9, qui devait mettre sur orbite ce samedi le satellite Amos 6, le top du top de la technologie de pointe de l’Etat hébreu. Un bijou développé en secret pendant plus de quatre ans. «C’est le satellite le plus perfectionné et le plus cher, environ 190 millions d’euros, jamais développé en Israël, explique le chroniqueur scientifique Oudi Etzion. L’Industrie aéronautique israélienne (IAI), qui l’a assemblé, s’était surpassée.»

Pour l’heure, la société américaine SpaceX, chargée d’organiser le lancement, reste évasive quant aux raisons de l’accident. En attendant, l’échec du lancement retarde pour une période indéterminée les plans de Facebook et de l’opérateur français Eutelsat, qui voulaient utiliser Amos 6 pour relier quatorze pays d’Afrique subsaharienne à l’Internet rapide. Mais il porte également un coup sévère à l’industrie spatiale de l’Etat hébreu puisque Amos 6 devait être également utilisé par le ministère de la Défense de l’Etat hébreu pour des missions touchant à l’observation, aux renseignements, ainsi qu’aux communications militaires. Un aspect nettement moins glamour que le projet humanitaire de Facebook et dont personne ne parle d’ailleurs en Israël puisqu’il touche à la défense nationale.

190 millions d'euros en fumée

Amos 6 était censé prendre le relais d'Amos 2, un satellite vieillissant lancé de Baïkonour (Kazakhstan) en 2003. Puisque ce ne sera pas le cas, les experts israéliens espèrent qu'Amos 2 tiendra encore le coup quelques années même si ses capacités sont limitées. «Quoiqu'il arrive, nous ne pouvons pas nous permettre d'être coupé de toute liaison satellitaire», a estimé le président de l'Agence spatiale israélienne Isaac Ben Israël. «Nous allons donc tirer sur la corde.»

En bonne logique, l’Etat hébreu aurait dû se charger lui-même de lancer ses petites merveilles à 190 millions d’euros mais il n’en a pas la capacité. Sa base de lancement de Palmachim (sud du pays) ne tient pas la comparaison avec les sites internationaux tels Cap Canaveral. En quelques heures, Spacecom, la société israélienne détentrice d’Amos 6, a en tout cas vu le cours de son titre dévisser de 8,8% à la Bourse de Tel-Aviv. Parce que la destruction de son nouveau jouet la prive des 300 millions d’euros de revenus que devaient générer les services rendus à Facebook, à Eutelsat, ainsi qu’à l’appareil militaro-sécuritaire israélien.

Trois ans pour assembler un nouvel Amos 6

Le coup est d’autant plus dur que Spacecom a perdu il y a neuf mois tout contact avec Amos 5, un satellite de communication lancé en décembre 2011 à partir du Kazakhstan. Certes, cet accident n’a pas atteint la crédibilité de l’entreprise puisque le groupe chinois Xinwei Technology vient de s’en porter acquéreur pour 285 millions de dollars. Cependant, le contrat conditionne la finalisation de l’achat de Spacecom par le groupe chinois à la mise en orbite d’Amos 6 ainsi qu’à la démonstration de son caractère opérationnel. Selon les experts israéliens, cela ne se fera pas dans l’immédiat puisqu’il faudra au moins trois ans pour assembler un satellite semblable à celui qui vient d’être pulvérisé.