Cette fois, c'est fait ou presque : Bayer s'est entendu avec Monsanto pour lui mettre la bague au doigt. Le chimiste allemand, qui fabrique entre autres les très décriés pesticides «tueurs d'abeilles», a annoncé mercredi s'être offert l'américain, champion mondial des semences OGM et fabricant de l'herbicide Roundup. Pour parvenir à ses fins, Bayer a mis pas moins de 66 milliards de dollars (presque 59 milliards d'euros) sur la table. Ce qui en fait la plus grosse acquisition d'un groupe étranger par une entreprise allemande, loin devant celle de Chrysler par Daimler à la fin des années 90, pour 36 milliards de dollars. La première offre, en mai, battait déjà tous les records : 62 milliards de dollars. Mais Monsanto avait fait la fine bouche, poussant Bayer à relever son offre.
Pourquoi cette acquisition ? «La transaction met ensemble deux activités différentes, mais fortement complémentaires» : semences d'un côté et engrais et pesticides de l'autre, met en avant le groupe allemand, pourtant déjà surendetté, dans un communiqué. A eux deux, Bayer et Monsanto pèseront 23 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel et regrouperont pas loin de 140 000 employés dans un secteur qui était déjà très concentré. Cette course entre les géants de l'agrochimie a pour but de contrôler un maximum de brevets, en particulier sur les OGM. Et de vendre aux agriculteurs un «paquet complet», incluant semences, engrais et pesticides chimiques qui vont avec. De quoi alarmer ONG et associations paysannes. «Avec un tel "paquet", l'agriculteur sera totalement sous la dépendance d'une seule entreprise, dénonçait en mai Guy Kastler de la Confédération paysanne. Et ces multinationales auront encore plus de poids sur les gouvernements pour faire passer des réglementations qui obligeront les agriculteurs à utiliser leurs produits. Regardez la guerre qu'elles font déjà aux semences paysannes.» Le rachat de Monsanto par Bayer «pourrait être une mauvaise nouvelle pour le citoyen et le combat que nous menons pour une nourriture saine», s'inquiète l'eurodéputé PS Marc Tarabella. Si les deux firmes espèrent célébrer leur fusion d'ici à fin 2017, il leur faudra d'abord obtenir le feu vert d'autorités de la concurrence qui, en Europe comme aux Etats-Unis, freinent déjà sur les noces en cours de leurs rivaux : DuPont et Dow Chemicals d'un côté, ChemChina et Sygenta de l'autre.