Il a la forme d'un œuf, ou d'un grain de café. A Vélizy-Villacoublay, dans les Yvelines, le «pavillon» crée par XtreeE a poussé dans les jardins du campus Dassault Systèmes. Construit en béton, il mesure 3 mètres de haut et un peu moins de 20m2. Surtout, il est né grâce à l'impression 3D, ou impression additive.
«C'est une première, en tout cas en Europe», a affirmé Frédéric Vacher, directeur en charge de la prospective et de l'innovation ouverte chez Dassault Systèmes. Même si la Chine est déjà parvenue à créer des maisons grâce à l'impression additive, ils n'avaient fait que «reprendre des techniques déjà existantes», explique Philippe Morel, président de XtreeE, la start-up en charge du projet. Tandis qu'eux sont parvenus à «recréer des formes géométriques complexes».
Pour donner naissance à ce pavillon, qui n’est en fait que la première pièce d’une maison du futur, la start-up s’est attiré des soutiens de poids. Elle s’est notamment associée à Dassault Systèmes, et à sa plateforme 3DExperience, qui soutient les start-up. L’entreprise robotique ABB lui a fourni le plus gros robot de sa gamme, et Lafarge-Holcim un ciment «spécialement conçu» pour elle et «très performant», détaille Morel. Car pour que l’impresssion fonctionne, il faut que le ciment puisse passer dans les têtes du robot et sèche très rapidement, en moins d’une seconde. Si les fondateurs de la start-up ont choisi le béton, c’est parce qu’ils y croient, «comme dans le métal, beaucoup plus que dans les polymères [plastiques, bois, résines…, ndlr]».
Pour le moment, il faudra se contenter de ces quelques mètres carrés de pavillon à deux entrées. «C'est un peu sommaire, a estimé Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, venue à cette présentation. Mais c'est une prouesse technologique.» Ce qui ne l'empêche pas de prédire : «Grâce à ces technologies, nous pourrons construire des logements moins chers, plus vite.» Plus vite, oui. Il n'a fallu qu'une vingtaine d'heures au robot pour imprimer les quelque 700 couches de béton nécessaires à la fabrication du «pavillon». Moins cher, cela reste à prouver.
Il n’y a pas que l’impression qui dépend de la technologie 3D, toute la conception y est passée. Les maquettes ont été imprimées grâce à l’impression additive, le dessin a été réalisé sur tablette… et la visite a même pu se faire, avant impression, grâce à des casques de réalité virtuelle. Une technologie primordiale qui a, selon Dassault Systèmes, vocation à être de plus en plus utilisée. «C’est très important pour les clients de visualiser ce que sera leur projet», explique ainsi David Nahon, directeur du secteur réalité virtuelle chez Dassault Systèmes. Qu’il s’agisse d’une maison ou d’une cabine d’avion.
Les prouesses se jouent aussi sur les logiciels. Si le logiciel Catia était déjà utilisé pour créer des petites pièces d’ingénierie, dans les avions par exemple, il a également permis de choisir le style du pavillon. «Une fois les données rentrées, le logiciel propose les différentes formes que peut prendre la pièce que l’on veut fabriquer, détaille un employé de Dassault Systèmes. Il fait un vrai travail de design.»
Nul doute que l'œuf de XtreeE est la preuve d'avancées technologiques. Il reste cependant quelques problèmes à régler : l'impossibilité d'imprimer autour d'une armature en fer, par exemple. Autre difficulté, le poids du béton qui ne lui permet pas de s'adapter à toutes les courbures souhaitées. Pas sûr enfin que l'on veuille s'installer dans cet œuf bétonné, même s'il ne représente que l'entrée d'une future maison.
Mais pour Philippe Morel, ce n’est qu’un début. «En deux siècles, les avancées ont été vertigineuses. Tout va très vite», dit Philippe Morel, persuadé qu’il s’agit d’une «innovation fondamentale dans le domaine de la construction.»