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Libération

Greenpeace atomise les comptes d’EDF

publié le 17 novembre 2016 à 20h06

Greenpeace a bien choisi son moment. Au lendemain des déclarations rassurantes d'EDF sur l'EPR de Flamanville, chantier qui serait enfin «sur les rails», l'ONG a dégainé jeudi une étude alarmante sur ce qu'elle estime être la réalité des comptes financiers de l'exploitant des 19 centrales nucléaires françaises. Selon l'audit, l'électricien surévalue considérablement ses centrales et sous-évalue «drastiquement» le coût des provisions nécessaires au démantèlement de ses installations nucléaires et à la gestion des déchets, alors qu'il doit faire face à un mur d'investissement d'ici à 2025. Bilan des courses, il manquerait 50 à 60 milliards d'euros dans les caisses d'EDF. Et le groupe serait «en faillite» s'il devait ajuster son bilan à l'audit.

L'étude estime qu'EDF va devoir investir plus de 165 milliards d'euros d'ici à 2025, soit plus de 15 milliards par an. «Une somme astronomique sur laquelle EDF se garde bien de communiquer !» pointe Florence de Bonnafos, chargée de campagne énergie et finances chez Greenpeace. Selon l'audit, le groupe n'a pas assez provisionné d'argent pour faire face à ses engagements, notamment en matière de démantèlement. Surtout s'il faut fermer et commencer à déconstruire 17 réacteurs en fin de vie pour respecter les objectifs de la loi sur la transition énergétique qui entend limiter à 50 % la part du nucléaire dans la production électrique : «Le sous-provisionnement global est évalué entre 57,3 et 63,4 milliards d'euros en 2025», soit bien plus que les fonds propres d'EDF, proches de 25 milliards, selon l'ONG. Pour Greenpeace, «il est évident que la stratégie de prolongation des réacteurs coûte plus cher que de les fermer».

De son côté, EDF n'entre pas dans ce scénario de fermeture tant que l'Etat (actionnaire à 84 %) ne l'y oblige pas. L'entreprise a ainsi évalué ses besoins d'investissements entre 12,5 milliardss et 13,5 milliards d'euros par an au cours des trois prochaines années. EDF parie que la loi sur la transition énergétique n'est pas près de dépasser le stade des «objectifs», surtout si la droite revient au pouvoir. Quand on sait que la seule centrale de Fessenheim ne fermera pas avant 2018, contrairement à ce qu'avait promis François Hollande, EDF aurait tort de se priver… L'entreprise parie également sur la prolongation de quarante à cinquante ans, voire soixante ans, de la durée de vie de 34 de ses réacteurs, qui nécessitera un feu vert de l'Autorité de sûreté nucléaire. Ce qui n'est pas totalement acquis.