La métropole du Grand Paris a un problème: son jeune âge. Créée par la loi le 1er janvier 2016, elle a besoin, comme dit son président Patrick Ollier, «de signes artistiques et architecturaux pour la rendre lisible». Le futur réseau de métro du Grand Paris Express va lui donner une géographie. La consultation «Inventons la métropole» est supposée lui fournir une image.
Le président de la métropole ne s'en cache pas: l'idée à été décalquée sur le modèle de «Réinventons Paris», consultation d'un nouveau genre qui avait fait énormément parler. «Les équipes de Paris nous ont beaucoup aidés», reconnaît Ollier, qui ne cache pas être bien content de n'avoir, précisément, rien eu à inventer.
Des terrains disponibles
Dans ce type de consultation, il faut d’abord recenser les terrains disponibles. Puis demander aux investisseurs combien ils mettraient sur la table pour les acquérir et surtout, ce qu’ils bâtiraient dessus. Les équipes sont certes menées par l’investisseur mais lourdement lestées d’architectes, urbanistes, paysagistes, thermiciens et de tous les métiers qui ont à voir avec la fabrication de la ville. On est loin d’un concours de chéquiers même si les investisseurs font quand même leurs calculs.
Pour la version métropolitaine, sur 57 sites proposés en février 2016 par certaines des 131 communes composant le Grand Paris, 420 équipes d'aménagement se sont portées candidates. Patrick Ollier se félicite d'un retour aussi bon, preuve, dit-il, «d'un appétit de métropole». A l'issue de la première phase qui s'est achevée ce mercredi, 164 ont été retenues. 42% des mandataires sont issus des grands groupes de BTP (Bouygues, Vinci, Eiffage) ou de la promotion (Altarea-Cogedim, Nexity, Compagnie de Phalsbourg, Nacarat, Pitch, etc.). Mais 58% sont des indépendants. Le choix final doit être terminé en septembre prochain de sorte qu'à la façon des pots et des couvercles, chaque site ait son aménageur. A la clé : 6,4 milliards d'euros d'investissements et 2,6 millions de mètres carrés à construire.
High et low tech
A ce jeu-là, les sites peuvent mesurer leur pouvoir d’attractivité. Le nombre de dossiers déposés a varié, selon les endroits, de quatre à vingt. Epinay n’a attiré personne: zéro dossier. Mais on s’est bousculé au portillon des 21 terrains autour des futures gares du Grand Paris Express, dont la rentabilisation fait peu de doute. Ils représentent 50% du foncier de la consultation.
Des 164 dossiers qui ont été retenus pour la finale, les organisateurs ont retenu quelques grandes tendances. Beaucoup de high-tech, avec des bâtiments connectés, des smart-grid et du Bim (Building information modeling). Mais aussi beaucoup de low tech, avec des constructions bois, du recyclage des matériaux de démolition. Et de l’agriculture urbaine à haute dose.
Curieusement, l'opération a beau être «la plus importante consultation urbaine d'Europe» comme dit Ollier, elle n'a pas attiré les investisseurs européens. Les mandataires sont très franco-français. La liste des architectes en revanche comporte quelques beaux noms venus de l'étranger (Skidmore, Owing & Merrill, Rogers, OMA, Shigeru Ban, MVDRV…) et à peu près toutes les célébrités françaises.
Patrick Ollier, qui a effectivement scruté de près le précédent du concours parisien a fait ce qu'il fallait pour éviter les polémiques sur la faible rémunération des architectes qui avaient consacré un temps fou à ces dossiers complexes pour trois ronds de carotte ou même zéro. Là, «on leur a demandé une simple esquisse», a résumé le président, qui ne doit pas dessiner souvent. Il a aussi borduré le cadre avec l'Ordre des architectes et il est prévu que les concepteurs soient rémunérés par les investisseurs. A quelle hauteur? «Ce n'est pas moi qui paye», répond-il.