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Eclairage

L’Allemagne, élève modèle… surtout à l’étranger

Si Berlin semble se distinguer sur le créneau des énergies renouvelables, le bilan détaillé est plus mitigé.
L'usine sidérurgique de Völklingen. (LaurPhil / Flickr)
publié le 30 mai 2017 à 17h06

L'Allemagne a longtemps été donnée en exemple en termes de développement durable. En 2012, l'OCDE consacrait un rapport à sa politique environnementale, qualifiée de «laboratoire de la croissance verte». Depuis, l'Allemagne semble piétiner, sauf sur le créneau des énergies renouvelables. Dans son rapport de 2012, l'OCDE mettait en avant la part que le développement durable (énergies renouvelables, activités de protection du climat, nouveaux types de transports…) pourrait représenter dans l'avenir en pourcentage du PIB ainsi que le potentiel d'emplois que pourrait créer la croissance verte au sens large du terme. Et la conclusion était optimiste : «Le secteur des biens et services environnementaux définis au sens large pourrait enregistrer une croissance d'environ 7,7 % par an pour atteindre un chiffre d'affaires de 300 milliards d'euros en 2020, apportant ainsi une importante contribution à la croissance économique et à l'emploi.» Toujours selon le rapport, un tiers de cette économie verte - biens et services, notamment les systèmes photovoltaïques, les produits d'isolation et les aérogénérateurs - serait destiné à l'export.

Cinq ans plus tard, le bilan est plus mitigé. Parmi les points positifs, les investissements publics consacrés à la recherche sur les énergies ont progressé : de 400 millions d'euros en 2006 à 875 millions d'euros en 2016. Un tiers de ces moyens publics sont consacrés à la recherche sur les énergies renouvelables. Du côté du bilan énergétique, la part des énergies renouvelables a également progressé : solaire et éolien ont produit en 2016 près d'un tiers de la production d'électricité du pays et 32 % de la consommation étaient couverts par les énergies vertes. «Pourtant, le rythme de croissance actuel ne permettra pas d'atteindre les objectifs qui avaient été fixés pour 2020», soulignent les experts du think tank berlinois Agora, pointant les limites du modèle allemand.

Autre point faible : la part de l'électricité produite à partir du charbon et du lignite - charbon de mauvaise qualité dont l'Allemagne possède d'importantes réserves - reste élevée : 23 % pour le charbon, 17 % pour le lignite. «Nous devons aller plus vite», estime Angela Merkel au sujet du développement des énergies renouvelables. La chancelière aimerait conserver son image de «chancelière du climat», acquise en 2007, lorsque l'Allemagne exerçait la présidence tournante du G8. Elle avait alors imposé à l'Union européenne le principe dit «des 20-20-20» : 20 % de réduction des gaz à effet de serre, augmentation de 20 % de la consommation d'énergies renouvelables et augmentation de l'efficacité énergétique de 20 % d'ici 2020.

«Angela Merkel lutte pour le climat… mais au niveau international», résume, sarcastique, le quotidien Tagesspiegel. «En Allemagne, on a bien progressé en termes d'énergie propre, explique Claudia Kemfert, spécialiste de la recherche énergétique et de la protection de l'environnement au sein de l'institut berlinois DIW. Mais peu au niveau des transports durables ou du bâtiment économe en énergie.» L'Allemagne a certes créé deux millions d'emplois dans la protection de l'environnement, «mais on risque de perdre d'énormes potentiels d'emplois dans les nouveaux concepts de transports et les économies d'énergie dans le bâtiment» , conclut Claudia Kemfert. A moins d'une plus grande volonté politique pour développer ces secteurs d'avenir.