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RIP Diesel

Voitures électriques : Volvo fait le pari du tout vert

Racheté par le Chinois Geely en 2010, le constructeur suédois en forte croissance ne sortira plus d'ici deux ans que de nouveaux modèles électriques ou hybrides. Une stratégie haut de gamme dans la lignée de celle de son concurrent américain Tesla.
Le PDG de Volvo Cars, Hakan Samuelsson, à Stockholm le 5 juillet. (Photo Jonas Ekstromer. AFP)
publié le 6 juillet 2017 à 11h10

Fin 2014, le constructeur suédois Volvo Car, filiale du constructeur chinois Geely, avait fait sensation en annonçant son objectif de parvenir à zéro mort au volant de ses véhicules d'ici 2020. Le constructeur vient de récidiver avec une nouvelle annonce choc ce mercredi en dévoilant une stratégie 100% électrique ou hybride : à compter de 2019, tous ses nouveaux modèles seront équipés de l'une ou de l'autre de ces technologies. Le groupe de Göteborg, sur la côte occidentale suédoise, est ainsi le premier constructeur historique à sauter le pas et prévoir d'électrifier tous ses modèles à un horizon proche. Racheté par le chinois Geely depuis 2010 après avoir appartenu à Ford, Volvo compte lancer cinq modèles intégralement électriques entre 2019 et 2021 : trois sous sa marque et deux sous l'appellation Polestar, sa branche sportive devenue récemment une marque à part entière.

Cette filiale destinée à se spécialiser dans le développement de véhicules électriques à hautes performances entend concurrencer Tesla sur le créneau des véhicules haut de gamme. L’américain s’apprête pour sa part à lancer vendredi la production de son troisième modèle. Un modèle milieu de gamme, le «Model 3», plus abordable que les Model X et Model S et qui sera vendu moins de 35 000 dollars (30,8 millions d’euros) outre-Atlantique. Son fondateur Elon Musk a récemment déclaré que Tesla était sur la bonne voie pour produire 200 000 «Model 3» d’ici décembre, soit un chiffre jamais vu pour ce constructeur aux prises avec des problèmes d’approvisionnement du marché récurrents depuis ses débuts.

«Cette annonce marque la fin des voitures équipées seulement d'un moteur à combustion», a déclaré le patron de Volvo, Håkan Samuelsson, selon lequel la combinaison de nouveaux modèles 100% électriques et d'autres hybrides (carburant-électricité) permettra au constructeur de disposer d'une offre de voitures électriques «parmi les plus larges du marché». Le premier modèle électrique sera fabriqué dès 2019 en Chine. Le constructeur suédois, dont les ventes ont fortement augmenté de 6,2% en 2016 à 534 000 unités avec une croissance à deux chiffres en Chine ou aux Etats-Unis, a fait le constat que «les consommateurs plébiscitent de plus en plus les voitures électrifiées» et entend se concentrer sur ce seul créneau. Une annonce qui survient une semaine après que Geely eut dévoilé un projet de centre d'innovation et de recherche à Göteborg centré sur le développement de véhicules électriques.

Les modèles diesel trop chers à produire

En mai dernier, dans une interview au quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), le PDG de Volvo Cars avait déclaré renoncer au développement de nouvelle génération de moteurs diesel en raison des coûts importants liés au durcissement à venir des réglementations. La législation européenne prévoit que les voitures neuves devront respecter des émissions moyennes de 95 grammes de CO2 par kilomètre (g/km), sous peine de sanctions, à l'horizon 2021. Et en Suède, le gouvernement envisage de quintupler le taux de taxation des émissions de CO2 dès 2018 : d'après les calculs du magazine automobile suédois TeknikensVärld, le propriétaire d'un 4X4 Volvo V90 T5 (154 g/km) devrait ainsi payer 630 euros de taxe par an, celui du puissant SUV BMW X6 M (258 g/km) plus de 1 500 euros. Un coût qui reste cependant marginal comparé au prix d'achat de ces modèles haut de gamme (entre 60 000 et 100 000 euros), font valoir les défenseurs de cette écotaxe.

«Nous avons des objectifs climatiques ambitieux en Suède», a déclaré à l'AFP le ministre suédois des Entreprises et de l'Innovation, Mikael Damberg, faisant valoir que «les modes de propulsion propres sont absolument indispensables pour relever le défi climatique». D'après les derniers chiffres de l'association européenne des constructeurs automobiles (ACEA), les voitures 100% électriques et hybrides ont représenté, en 2016, 433 847 immatriculations de voitures neuves dans l'Union européenne, soit près de 3% du total. Les modèles tout-électrique ont crû de 7% par rapport à 2015, ceux d'hybrides rechargeables de 3,9% et ceux d'hybrides non rechargeables de 27,3%.

Une éventuelle entrée en bourse

Volvo ambitionne pour sa part d'écouler un million de voitures électriques avant 2025, date à laquelle le suédois souhaite que ses opérations de production deviennent «climatiquement neutres». Depuis que Zhejiang Geely Holding Group a racheté la marque à l'américain Ford en 2010, Volvo Cars a connu un redressement spectaculaire. En 2016, son résultat net part du groupe a presque doublé pour dépasser 600 millions d'euros. Depuis plusieurs mois, la presse suédoise évoque l'éventualité d'une entrée en bourse de Volvo, jamais confirmée jusqu'ici. L'annonce de cette conversion au tout-électrique pourrait être un moyen d'attirer les investisseurs, jugent les spécialistes, qui citent l'exemple de Tesla. Ce mardi 4 juillet, la société née en 2003 était valorisée 57,9 milliards de dollars, soit une hausse de 33% sur les quatre derniers mois. C'est plus que Ford et General Motors.

Reste le problème des livraisons de véhicules auquel le nouveau concurrent de Tesla sera lui aussi confronté dans sa conversion très rapide à l'électrique. Au premier semestre, le constructeur américain n'a réussi à livrer que 47 000 véhicules, soit moins que l'objectif de 50 000 unités visé. «Il n'est pas possible de se convertir aussi rapidement à la production de voitures électriques et hybrides», fait valoir un spécialiste du marché suédois au quotidien Aftonbladet, qui ne voit qu'un effet d'annonce dans la promesse de Volvo d'écouler un million de ces nouveaux modèles à l'horizon 2025.