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Industrie

GM&S : la justice joue les prolongations

Le tribunal de commerce de Poitiers accorde une ultime semaine supplémentaire pour que l'Etat, le repreneur, les constructeurs automobiles et les salariés s'accordent sur une solution de reprise.
Les salariés de GM&S attendent la décision du tribunal, dans leur usine de La Souterraine, le 24 juillet. (Photo Pascal Lachenaud. AFP)
publié le 24 juillet 2017 à 19h59

Le dossier GM&S du nom de ce sous-traitant automobile installé dans la Creuse et placé en liquidation judiciaire, ressemble de plus en plus à un juke-box. On y rajoute une pièce pour continuer à entendre la musique. Celle du jour est distillée par le tribunal de commerce de Poitiers qui a décidé, ce lundi, d’accorder un délai supplémentaire d’une semaine, afin qu’une solution puisse être trouvée pour cette entreprise qui emploie, à ce jour, 277 salariés.

Les magistrats ont donc prévu de se réunir le 31 juillet afin de vérifier si plus rien ne s’oppose à la reprise de GM&S. Ils veulent en effet avoir des garanties sur les engagements financiers promis par l’Etat et les deux grands constructeurs automobiles Renault et PSA. Seront également examinées la manière dont les murs de l’usine vont être vendus et la position des salariés à l’égard du repreneur.

Points de friction

Or, jusqu’au milieu de la semaine dernière, quelques sérieux points de friction demeuraient encore pour une poursuite de l’activité de l’entreprise. L’unique candidat au rachat, l’équipementier automobile GMD, basé à Saint Etienne, a depuis le départ posé une série de conditions pour s’engager de manière ferme.

La première est de pourvoir disposer d’un plan de 15 millions d’euros d’investissement pour moderniser un site industriel plutôt vieillissant. L’Etat et Renault, l’un des deux principaux donneurs d’ordres de GM&S, ont dit OK. PSA s’est fait en revanche sérieusement tirer l’oreille. Le propriétaire des marques Peugeot et Citroën estimait jusque-là que son engagement d’assurer 12 millions d’euros de commande chaque année, pendant 5 ans, à GM&S, était amplement suffisant.

Depuis le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, n’a pas négligé les coups de fil pour rappeler au numéro un de PSA, Carlos Tavares, que son refus risquait de faire tache mais qu’il portait, en outre, toute la responsabilité au cas où GM&S mettrait la clef sous la porte. Une réunion tenue le mardi 18 juillet au siège de PSA a permis de ramener le constructeur à des sentiments plus généreux. Comme son confrère et néanmoins concurrent Renault, PSA ira donc aussi de ses 5 millions d’euros pour la modernisation du site, quitte à faire passer une partie de cette somme en augmentation du prix d’achat des pièces détachées. Une manière de donner satisfaction aux demandes, sans vraiment afficher une reddition.

Date butoir

Pour autant le sauvetage de GM&S passe également par la résolution d’un imbroglio immobilier. Les bâtiments et le terrain de l’usine sont détenus par une société civile immobilière (SCI) qui appartient à ceux qui furent naguère propriétaire de l’entreprise entre 2009 et 2014. S’ils ont passé la main, ils n’en ont pas moins conservé les murs du sous-traitant automobile, ce qui leur a permis d’encaisser 250 000 euros de loyer par an depuis 8 ans. Une somme que le patron de GM&D, Alain Martineau, n’est pas prêt à payer pour poursuivre l’exploitation de GM&S. Il pourrait donc racheter cet ensemble immobilier à condition de tomber d’accord sur le prix avec les actuels propriétaires. La somme d’un million d’euros est évoquée. Dans ce cas, les vendeurs réaliseraient une jolie culbute.

Enfin, l'avis des salariés sera aussi un point déterminant. Jeudi 27 juillet, Alain Martineau devrait se rendre sur le site de GM&S pour rencontrer l'ensemble des équipes. «Je préférerais être reçu comme celui qui va sauver 120 emplois plutôt que le fossoyeur qui va en supprimer 157», indique-t-il à Libération. En clair, sans adhésion franche et massive du personnel, le repreneur a fait comprendre à l'Etat qu'il jetterait l'éponge.

Or, les salariés conditionnent, à mi-voix, leur accord au plan de reprise au versement d’une prime supra légale qui viendrait abonder leurs indemnités de licenciement. Ils tournent même leur regard vers PSA et Renault, les seuls, selon eux, à même de financer ce dispositif. «Niet» ont répondu, jusqu’à présent, les deux constructeurs automobiles, dans une touchante unanimité. C’est précisément sur ce dernier point que la date butoir du 31 juillet fixée par le tribunal de commerce apparaît bien difficile à tenir. Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, qui veut à tout prix éviter un échec sur ce dossier, n’a visiblement pas fini de multiplier les coups de fils pour rapprocher des points de vue, aujourd’hui encore bien trop éloignés.

Signe de fébrilité, dans la soirée de lundi, Bercy a appelé les salariés de GM&S à accepter l’offre de GMD.