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Libération

La vie hors cadre d’Helena Almeida

publié le 27 septembre 2018 à 20h36

Elle avait surgi d’un coup dans le paysage : une silhouette sombre au milieu de la photo, où elle déchirait un rideau de peinture bleue. On aurait dit qu’elle allait sortir du cadre. Image inoubliable, irruption d’autant plus inespérée que l’artiste Helena Almeida, dont on apprend la mort à l’âge de 84 ans, et qui représenta deux fois le Portugal à la Biennale de Venise, était quasi inconnue en France jusqu’à la rétrospective que lui consacra le Jeu de Paume à Paris en 2016. Pour beaucoup, ce fut l’occasion de découvrir un travail dont le point de départ, délaisser la peinture, donna lieu à une géniale remise en question des limites de chaque médium (elle mêla photo, sculpture et performance) et du plan pictural lui-même. Née à Lisbonne, où elle travailla toute sa vie, elle passa de longues heures, enfant, à poser pour son père, le sculpteur «officiel» de l’Estado Novo fasciste, Leopoldo de Almeida. A contempler les œuvres qu’elle créa par la suite, rigoureuses mises en scène de son propre corps, c’était désormais elle-même, qui choisissait les poses. Son impertinence vis-à-vis de la peinture peut aussi se satisfaire d’une lecture féministe.