Menu
Libération
Internet

Faux comptes et spammeurs, comment les réseaux tentent de réagir

Achat d’abonnés ou de likes, faux comptes... Facebook et Twitter cherchent des parades techniques ou juridiques.
Si la technique de l'achat d'abonnés est douteuse, elle reste pourtant légale. (Photo Kirill Kudryavtsev. AFP)
par Marjorie Ansion
publié le 12 avril 2019 à 15h57

Dans le vaste monde des réseaux sociaux, tout s’achète, même le clic qui «follow», «retweete», «aime». Face à ce phénomène, les opérateurs tentent de réagir pour éviter les fraudes. Twitter a récemment mis en place une nouvelle politique afin d’éviter le suivi en masse, une technique pour gagner rapidement de nouveaux abonnés. Parallèlement, les plateformes de Mark Zuckerberg, Facebook et Instagram ont entamé une lutte contre la commercialisation de followers, permettant de gonfler sa popularité à condition de sortir son porte-monnaie.

Twitter fixe une limite

Pour tenter d'endiguer les achats massifs, Twitter a mis en place mardi un nouveau dispositif. Désormais, un profil ne peut suivre que 400 nouveaux comptes par jour. «Nous changeons le nombre de comptes que vous pouvez suivre chaque jour de 1 000 à 400. Ne vous inquiétez pas, vous irez très bien», ironise le réseau social dans un tweet pour communiquer sur cette mesure destinée à limiter les «spammeurs». Ceux qui suivent en masse, une série de comptes, avant de se désabonner, afin d'espérer obtenir un «follow back» en contrepartie. Une limite de 400 abonnements difficilement réalisable pour tout utilisateur «normal» de Twitter, puisqu'il faudrait suivre un compte toutes les quatre minutes afin d'atteindre ce chiffre. Avec ce nouveau dispositif, impossible donc d'instaurer un système automatisé.

Il est possible d'aller encore plus loin, en achetant des followers. Et pour ça, il ne faut pas se lancer dans une grande enquête. En une recherche sur Google, les sites proposant des offres d'achat de followers pour son profil Twitter fusent. Un premier site propose 9 euros les 100 followers. Puis une promotion à 3 euros, en allant quelques pages plus loin. Un commerce en ligne comme un autre… Nombre de ces sites mettent d'ailleurs en avant le fait d'«augmenter votre popularité» ou de «donner un coup de pouce à votre profil». Cette technique douteuse, qui cible notamment Twitter et Instagram, reste pourtant légale. Rien n'interdit cet achat, puisque généralement derrière ces profils se cachent des personnes qui monnaient leur abonnement.

Facebook contre les faux comptes

Puis il y a une autre étape, celle de commercialiser des faux comptes. Pour la première fois, Facebook, et sa filiale Instagram, ont d'ailleurs entamé des poursuites judiciaires en mars à l'encontre de quatre entreprises chinoises, accusées d'être à la tête de vente de faux comptes, faux likes et faux abonnés. Les entreprises en question gèrent plusieurs sites internet à l'origine de vente de «comptes non authentiques». Un terme pour dire, que l'identité de cette «personne» est fausse, et que le compte ne sert qu'à être mis sur le marché. «En engageant ces poursuites, nous espérons renforcer le fait que ce genre d'activité frauduleuse n'est pas toléré et que nous agirons avec vigueur pour protéger l'intégrité de notre plateforme», écrit Paul Grewal, vice-président et avocat général adjoint de Facebook, dans un communiqué.

Avant d'interpeller la justice, Facebook s'était déjà mobilisé, de son côté, pour éradiquer les faux comptes. Quelque deux millions de faux profils ont été supprimés par la plateforme. Le responsable de l'équipe de sécurité de Facebook, Shabnam Shaik, reconnaît dans un communiqué : «Désormais, nous sommes capables de détecter des faux comptes de façon plus efficace.» Et ajoute, qu'après l'élection présidentielle de 2017, «en France, ces améliorations nous ont permis de prendre des mesures contre plus de 30 000 faux comptes». Chaque pays est touché. En janvier, Facebook a annoncé avoir supprimé des centaines de comptes liés à la Russie, diffusant des fake news.

A l'approche d'élections, comme les européennes au mois de mai, cette «triche» suscite une attention toute particulière de la part des modérateurs des réseaux sociaux. Facebook possède «une équipe qui se consacre [à ces] élections depuis un petit moment», a souligné Nathaniel Gleicher, responsable de la cybersécurité de la plateforme, dans un entretien au Monde. Il explique : «Nous voyons aussi beaucoup d'acteurs qui ne cherchent pas seulement à opérer un réseau de faux comptes, mais font aussi circuler l'idée qu'ils pilotent un réseau bien plus important dont nous n'avons repéré que le sommet de l'iceberg.»