Mostar envoyé spécial
Le «Vieux» est mort, vive le «Vieux» ! Au-dessus des eaux couleur émeraude de la Neretva, qui coule au milieu de Mostar, les ouvriers turcs s'activent pour tenter de ressusciter le Stari Most. Joyau de l'empreinte ottomane laissée sur les Balkans, le Vieux-Pont, édifié en 1566, a été détruit, il y a juste dix ans, par une pluie d'obus tirés par les milices croates de Bosnie-Herzégovine. Le 9 novembre 1993, ses blocs de pierre blanche séculaires s'effondraient avec fracas dans la rivière.
Après avoir assisté passivement à cet «urbicide», selon l'expression forgée par l'architecte serbe Bogdan Bogdanovic, la communauté internationale a voulu effacer ce stigmate douloureux de la guerre en reconstruisant à l'identique l'ouvrage signé de l'architecte ottoman Hajrudin. Lancés au début de l'année, les travaux financés par la Banque mondiale et plusieurs Etats européens doivent s'achever en juillet. Une grande cérémonie cathartique entre les communautés croate (catholique) et bosniaque (musulmane) est prévue afin de saluer la naissance d'un «nouveau Vieux-Pont», de chasser les fantômes du conflit qui opposa les deux communautés de mai 1993 à mars 1994 et de réunifier une ville coupée en deux, selon une ligne de partage ethnique.
Mais la fête s'annonce des plus morose sur les bords de la Neretva. Sur la rive est, dans les quartiers bosniaques, alternance de vieilles demeures ottomanes et d'élégantes bâtisses de style austro-hongrois, on pleure toujours le Stari Mos