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Libération
Enquête

La vie rafistolée

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Géorgie. Comme Guivi et Salomé, des milliers de Géorgiens ont recours au système D pour améliorer un quotidien fait de pénuries. Une déliquescence générale qui a conduit le pays à la «révolution des roses».
publié le 2 décembre 2003 à 2h09
(mis à jour le 2 décembre 2003 à 2h09)

Pas question de prendre le téléphone pour féliciter Salomé et Guivi Djaparidze de la «révolution des roses». La ligne de cette architecte et de son mari, chercheur en chimie, a été coupée pour facture impayée. «On a reçu en même temps la note de téléphone et celle d'électricité, et comme j'attends mon salaire depuis déjà un mois, on a choisi de payer l'électricité.» A 62 ans, Guivi porte beau. Homme de science, fils d'une dynastie de chercheurs, il en est réduit à se battre tous les jours pour survivre contre les pénuries et l'impécuniosité. «Un jour, ils nous ont coupé l'électricité. Je suis allé les voir. Je leur ai dit qu'ils savaient bien comment on vit dans ce pays. Ils n'ont rien voulu entendre.»

La maison Djaparidze a encore belle allure. Elégante, sur trois niveaux, avec ses terrasses et loggias en bois, elle se dresse à flanc de colline face à une petite église en rénovation. En hauteur, quoique en centre ville, elle s'ouvre à l'arrière sur la montagne boisée et le jardin botanique. «Mon grand-père et ses frères ont construit cette maison au début des années trente. N'ayant pas assez d'argent pour la terminer, ils l'ont vendue à l'Etat et conservé un étage», explique Guivi. Se loger à Tbilissi était à l'époque moins problématique que dans le reste de l'Union soviétique, où on entassait des familles différentes dans des appartements communautaires. La ville a échappé à la soviétisation qui a gâché l'essentiel des villes russes. On y trouve peu de grands immeubles et d