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Atolls atomisés.

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Longtemps, l'armée américaine a testé ses bombes dans les îles, notamment à Bikini. Certaines ont été pulvérisées, d'autres ont été transformées en poubelle nucléaire. Les habitants souffrent toujours des radiations.
publié le 31 décembre 2003 à 2h30

Kwajalein envoyée spéciale

Sans même tressaillir, l'Américaine frappe la balle alors que l'avion de ligne se pose sur le terrain de golf. Il en est ainsi des atolls où la vie s'organise en lignes parallèles. Sur un ruban de sable, il faut être funambule, apprendre à penser en longueur car tout écart mène à la mer.

Par le hublot défilent les cocotiers penchés, les gazons taillés et ces étranges champignons blancs ­ les radômes qui abritent les radars de l'atoll de Kwajalein. Dans ce bastion de la défense américaine, les meilleurs scientifiques que puisse recruter le Pentagone scrutent l'espace, mesurent la trajectoire et l'impact des missiles balistiques lancés à 6 700 km de là, de la base aérienne de Vandenberg en Californie jusqu'au coeur de cette cible froissée par les vagues du Pacifique. En période d'essais, quand le soleil disparaît, le plus grand lagon de la planète tremble sous l'explosion des missiles voyageurs touchés par les missiles tueurs lancés des rampes de Kwajalein. Dans le vacarme de cette arène, les nuits se fracturent et s'enflamment... «On dirait la guerre» murmurait la vieille dame qui, dans l'avion, se souvenait des bombardements de Londres.

L'armée a domestiqué Kwajalein. L'atoll affiche une rigueur qui n'est pas de mise dans ces îles où les Américains ont pris pied avec la guerre du Pacifique. Et si la plupart de leurs ex-territoires ont voté pour l'émancipation, ils restent tous liés aux Etats-Unis, dont l'aide financière est vitale. Des dollars contre