Berlin de notre correspondante
L'affiche recouvre tout un immeuble en travaux de la Friedrichstrasse, en plein coeur de Berlin. C'est l'un des endroits les plus passants de la capitale allemande. De loin, on dirait une énième publicité pour l'assurance retraite. Mais le père qui porte sa petite fille sur les épaules a l'air préoccupé. «Quand la pauvreté construit des murs», indique le message délivré par Diakonie. L'association humanitaire protestante, un équivalent de la Croix-Rouge, a voulu frapper fort. C'est la première fois que Diakonie utilise le terme de «pauvreté» dans une campagne de sensibilisation. Et pour cause. Le mot a longtemps été tabou. Les Allemands n'admettent pas l'idée que la troisième économie de la planète, le champion mondial des exportations, puisse engendrer de la misère. Et encore moins l'idée que la fracture sociale ait pu augmenter sous un gouvernement social-démocrate. Beaucoup, comme le chancelier Gerhard Schröder, préfèrent parler des «bonnes performances» des entreprises, et de la qualité des produits allemands. «Surprising economy» (surprenante économie) titrait, il y a trois semaines, l'hebdomadaire libéral britannique The Economist. Surprising, en effet. Les grands patrons n'ont jamais été aussi bien payés, mais le chômage est toujours à un niveau record : 4,7 millions de sans-emploi en août (11,4 %), sans compter les 600 000 personnes sorties des statistiques parce qu'elles ont trouvé des «jobs à 1 euro» (1). L'économie sociale de marché,