Personne ne prétend que Dieudonné ait le charisme de Malcolm X ou l'envergure de Martin Luther King. Seulement, «il n'est plus possible d'être contre lui. Affectivement, pour un Noir, je veux dire. Le critiquer, c'est s'attirer les applaudissements des Blancs bien-pensants», admet Stéphane Pocrain, ancien porte-parole des Verts. Dieudonné fédère autour de lui ceux qui se voient écartés des logements, des bonnes écoles, des médias, et cristallise un ras-le-bol, une impatience, des appétits d'action autour de la cause noire.
«Quand Dieudonné est venu sur le lieu des incendies [fin août], on était contents qu'il nous soutienne», raconte un représentant des Travailleurs ivoiriens de France, Gogona Gnizako, «mais on avait peur qu'il pète les plombs». Lors des manifestations qui ont suivi ces incendies, Jean-Baptiste Ayrault du DAL (Droit au logement), a vu Dieudonné «piquer» aux familles de victimes la tête de la manifestation. Mais il estime que l'humoriste aide les luttes, par ses relais chez «les Blacks conscientisés, installés». La Guyanaise Christiane Taubira, ancienne candidate (PRG) à la présidentielle de 2002, ne parvenant pas à élargir son audience, les Noirs de France ne voient pas d'autre tête d'affiche disponible pour porter leur colère, «son nouveau créneau», raille Patrick Karam du puissant collectif des DOM. «La rancoeur est telle, et tellement légitime chez les Noirs, que les plus modérés sont obligés d'être moins modérés», admet lui aussi Patrick Lozès, membre de