Krasnokamensk (Russie) envoyée spéciale
Le lever est déclaré», «Huitième division, au petit déjeuner», «Huitième division, à l'appel»... Depuis mi-octobre, Mikhaïl Borissovitch Khodorkovski, ancien homme le plus riche de Russie, vit dans une baraque-dortoir au rythme de ces appels, tellement sonores qu'on les entend jusqu'aux abords de la prison de Krasnokamensk. L'ancien roi du pétrole russe, qui avait osé défier Poutine et financer des partis d'opposition, a été envoyé à 5 000 kilomètres à l'est de Moscou, comme jadis les décabristes (1) puis les dissidents soviétiques étaient expédiés pour purger leur peine quelque part dans l'immense Sibérie. Pour un oeil occidental, cette colonie dénommée «Iag 14/10», dissimulée derrière des palissades cloutées de traviole, a l'air vraiment d'une fin du monde. Elle est située à la sortie d'une petite ville nouvelle de 68 000 habitants, posée dans la steppe depuis 1968 pour exploiter une mine d'uranium. En ce début novembre, il fait - 10° C au soleil, et d'ici à quelques semaines, il fera sans doute - 40° C. Des journalistes du magazine Russki Newsweek, qui se sont promenés aux abords de la prison avec un dosimètre, y ont relevé un taux de radioactivité montant jusqu'à 52 microroentgens par heure, quand le niveau maximum autorisé pour les zones habitables en Russie est de 25. Mikhaïl Khodorkovski doit purger ici une peine de huit ans de détention, officiellement pour fraude fiscale.
Les prisonniers «castés»
Pour les quelque 1 000 détenus, h