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Libération

La vie après Outreau

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L'an dernier, sept des dix-sept accusés étaient innocentés aux assises de Saint-Omer. Certains ont refait leur vie, en mieux, d'autres se débattent avec une existence brisée.
publié le 29 novembre 2005 à 4h42

Elle s'avance au milieu de la cour d'assises de Paris, comme une actrice qui viendrait recevoir un trophée. Elle a mis son chandail blanc, chic et sexe, et cela fait un moment qu'elle suivait un régime «hyperstrict» pour qu'il la moule, juste comme il faut. Le décolleté laisse deviner un petit tatouage, elle a choisi un nouveau blond pour ses cheveux. Ça lui va bien. Elle vient d'appeler son mari sur son portable, le dernier modèle, celui où l'interlocuteur s'affiche sur l'écran en même temps qu'il vous parle. Elle travaille maintenant pour une grande chaîne de télé, tout lui réussit, elle le sait, mais elle veut plus que ça. A la barre des témoins, elle prend le micro. Voix chaude, intonation de scène : «Je m'appelle Karine Duchochois, je suis née le 6 décembre 1977 à Calais.» Elle a un sourire, comme un triomphe et elle jette ses succès, sa beauté au milieu des ors et hermines des assises. «Rien de ce qu'on m'a fait ne m'a cassée. Au contraire : je suis devenue mieux qu'avant.»

«On était de pauvres gens»

Avant, c'était il y a un an et demi, devant une autre cour d'assises, à Saint-Omer. Cette fois, Karine Duchochois était sur le banc des accusés : elle faisait partie des treize à se dire innocents dans le procès d'Outreau, en première instance. Karine Duchochois avait raconté son RMI entrecoupé de petits boulots dans des hypermarchés, le premier gamin à 18 ans, les envies qui s'éteignent les unes après les autres entre le parking et la cage d'escalier, dans le quartier de la