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Dans le ventre de Mexico

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La Central de Mexico, les plus grandes halles d'Amérique latine, est une ville dans la ville, avec ses boutiques, ses banques, ses salons de beauté, ses restaurants, ses prostituées, ses voleurs, ses policiers et même son juge de paix.
publié le 29 juin 2006 à 21h37

Mexico de notre correspondante

omme tous les samedis depuis vingt ans, Enrique s'est levé à 4 heures du matin. Physiquement, Enrique est un condensé du «Doc» illuminé du film Retour vers le futur et du savant Cosinus. Pour son expédition, il a enfilé un jean troué et un vieux T-shirt. Pendant la semaine, il a soigneusement mis de côté des pièces de monnaie. Il les transporte dans un sac en plastique. Sa vieille Dodge jaune canari, 35 ans d'âge, crachote avant de démarrer. Mais, comme les chevaux de relais de poste, elle semble connaître la route et fend la nuit entre deux hoquets. Engorgées durant la journée, les rues de Mexico sont encore vides. Direction : Iztapalapa, un des quartiers pauvres de la capitale mexicaine où se trouve la Central de Abasto (centrale d'approvisionnement), la «panza» de Mexico, comme l'appellent les Mexicains, sa panse, son ventre, les plus grandes halles d'Amérique latine. La capitale du Mexique est la troisième ville du monde, plus de 20 millions de bouches qu'il faut nourrir chaque jour.

A cette heure, la ville dort encore, mais autour du site de 360 hectares (une étendue équivalente à 21 Stade de France), c'est l'effervescence. Les poids lourds font la queue aux péages. Seule la lumière crue de leurs phares troue l'obscurité. Comme il le peut, Enrique gare sa belle américaine entre deux camions et commence son marché. Sac sur l'épaule, cagnotte serrée en main à cause de la mauvaise fréquentation des lieux, il suit un itinéraire extrêmement préci