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Libération
Reportage

Moscou dans le coup

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Le 1er mars s'ouvre la deuxième Biennale de Moscou. Longtemps méprisé par les tenants tout-puissants de l'académisme postsocialiste, l'art contemporain russe dispose désormais de lieux et de fonds.
publié le 28 février 2007 à 6h21

Moscou de notre correspondante

Ça sent le vin et le moisi. Il fait froid, humide et sombre. Mais dans la pénombre, une fois les yeux accoutumés, on peut voir des machines à fabriquer des nimbes, un bulbe d'église émerger du toit d'un trolleybus ou des métros qui emmènent leurs passagers vers un troisième monde. Autant prévenir tout de suite : le centre d'art contemporain qui vient d'ouvrir à Moscou dans une ancienne fabrique à vins (winzavod, en russe) se visite avec manteau et chapka, en prenant garde, dans l'obscurité, de ne pas tomber dans la piscine d'une installation ou dans la tombe creusée par l'artiste Gueorgui Pouzenkov, derrière une barre de saut en hauteur (avant de finir enterré, l'homme a tendance à vouloir établir des records). Mais ni le froid, ni le morbide, ni la complexité de certaines oeuvres ne semblent arrêter le public russe. Sous les immenses voûtes de la Winzavod, où l'on gardait jadis des blocs de glace, c'est une foule joyeuse qui se presse depuis l'ouverture, fin janvier, pour décrypter les oeuvres à voix haute et éclater en rires communicatifs.

Affaire de prestige

L'inspirateur de ce premier grand projet de la Winzavod, Oleg Koulik, a accédé à la gloire dans les années 90 en faisant le chien, marchant à quatre pattes, jappant et mordant les commissaires des expositions. C'était un reflet assez fidèle de la condition dans laquelle se trouvait l'art contemporain russe : à la rue, toisé par les tenants de l'académisme postsocialiste et du pompier