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Libération

Ni turban ni képi

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L'élection possible d'un islamiste à la présidence a réveillé la société civile laïque. Les manifestants en appellent à la mémoire du fondateur de la République, Mustafa Kemal Atatürk. Mais demandent à l'armée, kémaliste, de rester dans ses casernes.
publié le 3 mai 2007 à 7h32
(mis à jour le 3 mai 2007 à 7h32)

Ankara, Istanbul envoyé spécial

Assistante de direction dans une agence de pub de la capitale turque, Ankara, Arzu a conservé la photo dans son ordinateur et l'a envoyée à toutes ses copines. On y voit la foule immense, un demi-million de manifestants, massée le 14 avril autour du mausolée de Mustafa Kemal Atatürk, le fondateur de la République. Au premier plan, le visage hiératique d'un soldat de la garde, avec une larme d'émotion qu'essuie un manifestant. C'est désormais une image culte. Depuis, il y a aussi celles des cortèges d'Istanbul, le 29 avril, qui ont réuni un million de personnes. Jamais le camp laïque ne s'était ainsi mobilisé, inquiet de l'élection par le Parlement d'un politicien issu de la mouvance islamiste à la présidence de la République. «Ce devait être au départ le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, maintenant c'est son alter ego, le ministre des Affaires étrangères, Abdullah Gül. Mais cela ne change rien : ils ont les maires de la plupart des grandes villes, ils ont la majorité à l'assemblée, ils tiennent le gouvernement et ils ne doivent pas avoir la présidence», explique une jeune femme, effrayée «de voir la Turquie risquer de devenir comme les autres pays musulmans». Une appréhension largement partagée dans ces classes moyennes éduquées des grandes villes de l'ouest de la Turquie, formées dans le culte de la République laïque et jacobine. Un monde que l'on surnomme ironiquement celui des «Turcs blancs».

«C'est le réveil d'une