Comme ils vivent cachés, on ne les voit pas. C'est comme s'ils n'existaient pas. Pourtant, ils sont plus de 100 000, un peu partout en France, à loger dans une caravane ou un cabanon. Il serait plus simple que ces hommes et ces femmes soient SDF, alcooliques, tsiganes, sans-papiers, RMIstes à vie, etc. Mais non, ces gens-là se lèvent le matin pour aller au boulot, ou sont à la retraite après avoir cotisé toute leur vie.
Caroline (1) habite un vieux mobile home le long de la RN 113, à la sortie de Béziers. Un simple bosquet la sépare de la route, et le bruit infernal des voitures traverse en permanence les frêles parois de l'habitacle. Autour, quatre autres caravanes et mobile homes sont habités, entourés d'épaves de voitures, de tôles rouillées, de flaques de boue et de déchets divers. «Le bruit ? On s'y habitue, vous savez», et puis «ici, tout le monde s'entraide, c'est vraiment formidable !», clame cette jolie quadragénaire rousse, avec un entrain un peu forcé. Sa tenue très soignée jure avec la misère environnante. Caroline est standardiste dans une entreprise de Béziers. Elle vit avec sa fille de 18 ans, et son fils de 10 ans. Très méfiante au premier abord, elle finit par lâcher quelques bribes de sa vie, mais refuse catégoriquement que son vrai prénom apparaisse dans le journal. «Avant, j'habitais une maison, à Lyon. Puis j'ai vécu en appartement pendant six ans. Ici, vous payez une misère, c'est le paradis ! Et ça n'empêche pas mes enfants de grandir et d'êtr