Les pas résonnent dans le couloir aux murs blanc sale. L'air est froid, chargé d'une odeur d'égout. «Toc, toc, toc.» Elle frappe avec la clé sur la porte de la cellule. «Je fais toujours ça. Pour qu'ils sachent que c'est moi, que ce n'est pas le surveillant. J'ai la clé, mais je n'ouvre jamais sans invitation.» Une voix dit d'entrer, une tête ensommeillée émerge : «Ma soeur, z'avez pas du tabac ?»
Isabelle Le Bourgeois fouille son sac. Même ainsi, à demi courbée, elle impressionne. Une taille de basketteur, des épaules de rugbyman, un timbre de stentor et un vocabulaire de charretier. pas exactement le cliché de la bonne soeur. Et pourtant, Isabelle Le Bourgeois, 60 ans, ancienne chef d'entreprise reconvertie en religieuse est aumônière à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis depuis douze ans. Figure un peu médiatique depuis que la ministre de la Justice Rachida Dati l'a invitée avec elle chez Drucker, depuis aussi qu'elle est membre du Comité d'orientation stratégique (COR) chargé de réfléchir à la future loi pénitentiaire, Isabelle Le Bourgeois a accepté que Libération la suive dans son quotidien à Fleury, plus grand établissement pénitentiaire d'Europe (lire encadré). A notre reportage, elle a mis deux conditions : «Qu'on parle surtout des personnes détenues. Et qu'on parle aussi des autres aumôniers.»
Cédric : «On parle de tout»
Sur la porte de la cellule de Cédric (1), une grande affiche placardée : «Le respect des autres commence par c