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Libération

Les accros se la jouent perso.

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publié le 18 février 2000 à 22h45

La fièvre du jeu a une valeur poétique quand elle est littéraire ou

cinématographique. Le personnage du joueur, un peu comme celui de l'alcoolique, charrie à lui tout seul un cortège romanesque qui va de soi, où la passion térébrante le dispute à la schizophrénie esthète. La situation du joueur vidéo n'est pas très éloignée: son loisir exubérant, puis irréductible, puis vénéneux, a vite fait de virer à l'addiction. Et s'il est rare qu'il s'en plaigne, la société peut s'en charger. Devra-t-on interdire l'accès des sites de jeux en ligne aux joueurs maladifs, comme on blackliste les impénitents du tapis vert sur les registres des casinos? C'est la question que l'on posera dans les colloques du Milia en 2010 ou circa.

Mais s'il parvient à s'extraire cinq minutes la tête de cette virtualité ludique qui le perdra, le joueur vidéo ne trouvera dans le monde réel que des motifs d'encouragements à son vice. Il verra surtout comment se dessinent les empires du jeu vidéo d'aujourd'hui et de demain, qui lui promettent chaque jour monts et merveilles high-tech, et comment chaque question que l'on croit cruciale est balayée chaque matin par un nouveau problème que l'on jure catégorique. La roue du temps semble en effet plus cynique, plus broyeuse et ironique dans l'univers relatif mais merveilleux des jeux vidéo que partout ailleurs, comme on le déduit, par exemple, après l'annonce faite par Havas Interactive, tenant jusqu'ici du dogme PC, de développer désormais des jeux pour consoles (Ha