Pendant que certains s'affairent à encombrer les bacs classique et romantique de leurs vains enregistrements, Marc Minkowski construit patiemment une discographie baroque définitive. Le public ne s'y trompe pas, les ventes spectaculaires de son Ariodante de Haendel avec Anne-Sofie Von Otter l'ont prouvé. La force de Minkowski, c'est de conjuguer une grande intelligence dramatique, un engagement et un raffinement inouï de ses Musiciens du Louvre-Grenoble et de chanteurs choisis avec une pertinence incontestable. Ces qualités si bien dosées, mises au service d'une tragédie lyrique peu connue de Jean-Philippe Rameau (1683-1764) - un seul enregistrement chez Erato datant de 1980 -, font de ce Dardanus une nouvelle référence aussi réjouissante qu'incontournable. L'argument existe: Dardanus, fils de Jupiter et favori de Mars, épouse Iphise, fille du roi des Phrygins, avant de fonder la ville de Troie. Mais comme toujours chez Rameau, les destins s'entrecroisent dans l'ouragan d'une nature et de dieux déréglés, rendus avec une inventivité musicale affolante.
Minkowski a déjà fait preuve de génie, pour transformer l'économie ramiste disparate en une lave souple et incandescente. Sa gestion ici des danses, des récits,
des airs et des ensembles fait merveille tout en restant ultra-expressive.
Dès les tambourins du Prologue, on fonce à mille à l'heure au milieu des tempêtes d'un Olympe furieux, d'une éclipse à la grotte d'un mage, tandis qu'inexorablement le règne de Vénus s'accomplit. Le