Caché derrière ses lunettes de glacier en pleine ville, planqué sous un bonnet tibétain griffé, invisible sous son look écolo-ethnico-pratique, le bourgeois nouveau est là. Bohème, pétrie de contradictions, de bons sentiments et d'égoïsme, d'éthique et de culte du bien-être, la nouvelle élite reprend à son compte les valeurs de 68, digère la vague bio-écolo, se préoccupe des excès de la mondialisation. N'empêche, même bohème, le bourgeois cultive ambition et succès social, distinction de classe et singularité du comportement. L'anticonformisme le guide. L'obsession d'être pris pour un beauf lui fera se précipiter pour acquérir ce petit quelque chose qui le différenciera du lot, bol à soja japonais, couverts à salade africains, bob rapporté de Millau... L'Américain David Brooks croque et moque dans Bobos in Paradise (Bobos pour «bourgeois bohèmes»), cette classe dirigeante directement issue de la société de l'information (1). Brooks décrit cette élite rajeunie (entre 30 et 40 ans) qui s'épanouit dans la nouvelle économie, les médias, le cinéma. Plus généralement, cette génération de «méritocrates» surdiplômés fait son lit dans toutes les professions intello-artistiques. David Brooks, influent journaliste (au New York Times et au Weekly Standard), assume son appartenance à cette caste jusqu'à se poser en «défenseur de la culture bobo». Même «si de nouveaux codes prennent la place des anciens, ils assurent un certain nombre de fonctions sociales immuables, qui donnent ordre et
L'été de tous les Bobos
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par Annick RIVOIRE
publié le 15 juillet 2000 à 2h17
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