Preuve de l'accélération de notre temps, il n'aura pas fallu attendre longtemps pour que l'art du siècle écoulé passe du rang de «contemporain» à celui, nettement plus digne, d'«antiquité». La Biennale des antiquaires de Paris, qui a ouvert ses portes hier, consacre ainsi un retour en force de l'art du XXe siècle. Evénement artistique, marchand et mondain, la biennale est le plus important rendez-vous au monde de cette profession, avec la foire de Maastricht.
Près de cent mille personnes vont s'y presser, dont on suppose raisonnablement que très peu auront en poche les quelques centaines de milliers de francs absolument indispensables pour s'offrir la moindre babiole.
Les stands arts déco (Dutko, l'Arc en Seine...) sont les phares de cette biennale, dominés par celui de la galerie Vallois qui a recréé un décor 1920 d'Eileen Gray. Le plus beau stand du mobilier XVIIIe est celui des Steinitz avec ses boiseries, mais ce n'est pas dans cette spécialité où elle est censée exceller que la biennale se montre la plus brillante. En dépit d'une conjoncture euphorique, le Salon est un petit millésime, d'autant que certains grands antiquaires, Kugel, Rossi et Ségoura, ont choisi de le bouder. Seul Camille Burgi fait dans la provocation réussie en exposant deux chaises qui proviendraient de la chambre du comte d'Artois à Bagatelle (elles ont passé l'obstacle de la commission d'experts alors même qu'elles sont contestées par certains grands antiquaires parisiens), à côté des deux fauteuils