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Libération
Critique

Pierre Boulez

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publié le 23 septembre 2000 à 4h42

Cette rentrée pose un maximum de questions métaphysiques: Pierre Boulez compositeur serait-il meilleur en live qu'en studio? C'est ce qu'on s'était dit en écoutant Explosante-fixe.. en CD, après l'avoir découvert en concert. Depuis l'enregistrement de Répons, une pièce pourtant écrite pour la spatialisation, on était un peu moins radical. Au point d'attendre avec impatience l'enregistrement de Sur Incises, entendue à la Cité de la Musique. Las, dans le CD qui paraît aujourd'hui, on ne retrouve pas la vie, la liberté, et la science raffinée qui semblaient animer l'oeuvre en concert. Qu'importe, quand il enregistre la musique des autres, Boulez continue de trouer le cul, et en plus dans des répertoires où on ne l'attend pas du tout. Après une Quatrième de Mahler à la fois chambriste et pointilliste avec le très structural Orchestre de Cleveland, impressionnante de lignes tranchées, phrasés nuancés et gradations dynamiques ultra-précises, le chef haute-définition met la claque en dirigeant les Wiener Philharmoniker dans la Huitième de Bruckner. Est-ce l'idée de dompter le cataclysme sonore tout en l'attisant, qui a motivé le chef dit «analytique», mais d'une violence toute terrienne quand il s'agit de rendre justice au Sacre avec Cleveland? Quoi qu'il en soit, on est une fois de plus soufflé par la gestion quasi-technologique des paramètres (respiration, équilibre dynamique), la solidité architecturale et la netteté des plans, au plus solaire des cuivres et au plus dionysiaque