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Libération
Critique

Les démons ménagers

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publié le 16 octobre 2000 à 5h23

Imaginez un magasin total, Au bonheur des dames et des hommes, qui «vendrait» toutes les icônes du siècle, de la bouilloire électrique de Peter Behrens (AEG, vers 1910) au téléviseur Wide 28 Sharp (2000). Avec «Les bons génies de la vie domestique» exposés au Centre Pompidou, tout le monde va y retrouver ses petits grigris. Les collectioneurs chineurs vont avoir envie de casser les vitrines, les nostalgiques vont se pâmer devant le téléviseur TV3 (Sonora, 1950) ou jeter une larme devant le moulin à café «Moouuliinexxx» (1956). Les obsessionnels pourront compter, par exemple, tous les lave-linge ou toutes les Cocotte-Minute, les deux outils qui ont le plus révolutionné le quotidien des femmes. Les érudits historicistes vont traquer les étiquettes et se laisser guider par un parcours chronologique en sept périodes, comme celle du Fonctionnalisme à l'heure du Deutscher Werkbund, 1900-1920 ou A l'heure du nouveau design, 1975-1990. L'écolo va hurler à la domination de l'objet démon sur l'homme. Les bobos (nouveaux bourgeois bohèmes) s'attacheront à décrypter un emballage scénographique d'images défilantes (signé Nathalie Crinière). Et les curieux devront faire le tri devant ces mille et une merveilles, tout en étant bluffés par deux cuisines: celle très moderne imaginée par Grete Lihotzky pour la Neue Frankfurt, en 1925, et celle dessinée en ligne continue, dans les années 30, par Raymond Loewy.

De nos vieilles barattes en bois aux appareils translucides et mobiles d'aujourd'hui,