Cet enregistrement est une première mondiale pour le Merlin d'Albeniz (1860-1909). En dehors des musicologues, qui savait que le merveilleux compositeur pour piano (Iberia) avait, en plus de charmantes zarzuelas, écrit de nombreux opéras, dont ce féerique Merlin, premier volet d'une trilogie consacrée au roi Arthur, devant autant à Wagner, Chausson, Debussy et Dukas ? L'idée d'écrire un Ring celtique concurrençant celui du maître de Bayreuth avait germé dans l'esprit du riche mais médiocre librettiste britannique Francis Money Courts, qui commanda à Albeniz la musique de ce projet se démarquant des Nibelungen par son cosmopolitisme délirant. Certes, impossible de nier la tonalité chevaleresque ou héroïque, le caractère leitmotivique, la caractérisation très tendue de l'écriture vocale. Domingo apporte le rayonnement de son Siegfried à cet Arthur, Jane Henschel est walkyrienne en Morgane, et Alvarez tient son Merlin avec une fermeté racée, mais tous portés par un discours ultramélodique. Et la façon qu'a Albeniz de tisser chromatisme, modalité «ancienne» ou par tons, réminiscences grégoriennes littérales et sensualité solaire du développement orchestral, n'appartient qu'a lui. Jose Eusebio, artisan de cette reconstitution enthousiasmante, est un cousin précieux d'Antonio Pappano, dans sa gestion fluide du foisonnement harmonique, de l'alternance de piani impressionnistes et forte tonitruants, de la lumière nordique et méditerranéenne. La prise de son un peu mate n'empêche pas
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