Il faisait du trafic de Game Boy. Quand sa mère s'en était rendu compte, elle avait cru mourir. Son fils, son petit gars, un garçon bien élevé, sérieux, intelligent (il faisait plus grand que son âge), était un voleur. Qu'est-ce qu'il peut y avoir de pire comme métier, aujourd'hui, que trafiquant de Game Boy? (1). D'un coup de pouce, un seul, il avançait. Il faisait gicler le bonhomme, sautant l'obstacle, se riant de tout. Comme son frère aîné, quand il lançait, du pouce précisément, deux ou trois billes contre le mur. C'était ça le coup de main à avoir. D'ailleurs, il avait souvent mal au pouce après une partie de Daffy Duck ou un Super Mario (2). Pour son père, pour son grand-père, c'était une pièce de monnaie, jetée d'un air détaché contre un mur, un mur aussi indifférent que cette console miniature, cette console naine.
Faire dans le trou, faire où on te dit de faire, voilà le message de ce golf pour enfants pauvres, juste le temps d'une récré. Swing minimaliste, pauvre écran mal éclairé: tous les jeux Game Boy se ressemblent-ils donc à ce point? Les Pokémon, est-ce mieux que les Astérix ou les Barbie? Est-ce différent? Qu'est-ce qui pulsionne là? On sait que les grands aiment les scénarios de cinéma, les sous-Star Wars, les trucs salement festifs pour nouvel âge boy-scout. Mais les petits, eux, sont vraiment les nouveaux primitifs. En d'autres temps, Freud se serait défoncé le poignet sur ces pulsions archaïques et caverneuses.
Quelque temps plus tard, l'enfant rendit les