C'est un répertoire épuisé, aux pages trop tournées, au papier devenu mou. Certaines lettres ont disparu. Ne restent plus que ABCEFHIJKNOPQRT. C'est le carnet d'Eugène Atget, dans lequel le photographe (1857-1927) consignait les adresses des acheteurs de ses clichés décorateurs de théâtre, peintres, sculpteurs à une époque où la photographie était volontiers au service des autres arts. Aujourd'hui, l'objet, qui tenait dans une poche, s'étale sur 7,2 mètres de large par 2,5 mètres de haut, au centre culturel canadien. L'artiste Arnaud Maggs, par cette composition murale qui reproduit les 48 doubles pages du calepin, entend ainsi évoquer le travail d'Atget. Une photographie qui précisément s'attache à l'inventaire, à l'épuisement, au vide. Celui des rues de Paris, mais aussi celui de ses images d'intérieurs (autour de 1910), sous lesquelles on retrouve la même écriture sépia.
Une quarantaine de ces clichés sont exposés actuellement à la Fnac Etoile. Des chaussures montantes à côté d'un seau d'aisance sous une table de toilette: c'est L'Intérieur d'un ouvrier, rue de Romainville, précise Atget. En fait, on est chez lui et tant pis pour la véracité sociologique. Plus loin, le salon de la comédienne Cécile Sorel. Des miroirs, des portraits, renforcent l'impression d'un monde d'où l'humain est absent. Dans la Petite chambre d'une ouvrière, un bric-à-brac de pauvres objets grimpe au mur. Chez la modiste Mme C., place Saint-André-des-Arts, des chapeaux sur portants, multipliés pa