Zurich envoyée spéciale
Dans le hall éclairé, les règles sont une dernière fois répétées. Pas de montre phosphorescente, pas de téléphone portable. La cigarette, bien sûr, est prohibée. Sur un tableau, la carte des plats: mieux vaut choisir son menu, maintenant qu'il fait clair... Ultime regard à ses compagnons. A la queue leu leu, les doigts crispés sur l'épaule d'un serveur aveugle qui guide son petit monde, les clients soulèvent un épais rideau. Puis un autre. Et une porte enfin. On entend glousser, le noir est total. Pas même un rai de lumière, pas une ombre. Quelques trébuchements. Certains font de grands gestes, d'autres rentrent la tête dans les épaules. Tous s'assoient précautionneusement.
Au Blindekuh (la «Vache aveugle», un jeu équivalent à notre colin-maillard), les dîners ont le noir total pour seul décor. Et chaque jour, le restaurant zurichois affiche complet. Soixante couverts, quoi qu'il arrive. Des Zurichois, mais aussi des Allemands ou des Indiens, une école d'infirmières, le Rotary Club ou des séminaires de travail réservent leur place deux à trois mois à l'avance. Et les week-ends sont complets jusqu'en mai. Un succès que des restaurateurs munichois ont déjà décidé d'importer dans leur ville... Et la Vache aveugle n'arrêtera pas là sa folle cavalcade : dès le mois de mars, des soirées «Blind date» seront organisées en partenariat avec une agence matrimoniale.
Le Blindekuh a investi les hauts murs d'une ancienne église luthérienne, dans un quartier résidentie