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Libération
Critique

Ouvriers, paysans et les Straub

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publié le 13 février 2001 à 22h53

C'est rien de le dire, Jean-Marie Straub et Danielle Huillet ne chôment pas : une année et demie après Sicilia (quelque chose comme leur «tube»), le couple le plus entêté du cinéma revient remonté à bloc avec Operai, contadini, (photo) autrement dit Ouvriers, paysans. Derrière ce titre (que certains jugeront anachronique (en ces jours atrocements bobos), on peut lire à la fois un retour à la «ligne dure» et le résumé manifeste de toute leur oeuvre. Straub en personne parle de son film comme d'un «polar» ! Aux premiers abords, il s'agit juste d'un Straub- film revigorant, beau de deux heure cinq, doté en ouverture d'un panoramique hallucinant qui offre la sensation d'approcher le monde pour la première fois. Adapté du dernier des textes d'Elio Vittorini, le film atteint des degrés inconciliables de douceur (dans l'écoulement des durées) et d'exigence (dans la résistance obtue du dispositif), probablement dus à un mélange de sorcellerie et de patience d'ange. Dans un sous-bois matriciel, divinement photographié par Renato Berta, le cadre straubien se surpasse en luminosité pour capturer la parole politique en tant que dernier refuge. Jean-Pierre Duret remplace feu Louis Hochet au son, et son travail d'écoute est tout simplement spatial. Bref, ce soir, à la Cinémathèque française, où le film est projeté en avant-première en présence des auteurs, L'Internationale Straubienne (I.S.) aura du pain blanc sur la planche.PHILIPPE AZOURY

Cinémathèque française. Palais de Chaillot, 7 av.