En comparaison de la vie de James Victor Scott, né à Cleveland, Ohio, le 17 juillet 1925, les destins tragiques de Bessie Smith et Billie Holiday ressemblent à des existences dorées. A demi-étranglé par son cordon ombilical (tout le monde l'a d'abord cru mort-né), Jimmy Scott a commencé par mal négocier sa venue au monde. Quant à la suite de son enfance, elle n'a fait que confirmer ce fâcheux départ. Ainsi a-t-il tout juste 10 ans quand sa mère, June, pianiste à la Hagar's Universale Spiritual Church, est écrasée par un chauffard en essayant de rattraper sa fille, Shirley, tombée du trottoir; et treize ans quand son père, Arthur, disparaît, l'abandonnant, ainsi que ses neuf frères et soeurs, sans le moindre signe de regret. Victime, de surcroît, du syndrome de Kallman, maladie connue pour perturber le déroulement de la puberté (à vingt ans, il ne dépassera pas le mètre cinquante), «Little» Jimmy Scott va donc définitivement basculer dans le blues, se glissant timidement au micro de divers orchestres goguenards, eu égard à l'ambiguïté véhiculée par sa voix haut perchée. Va s'en suivre une succession logique de catastrophes: mauvaise distribution de ses disques, incompréhension de ses pairs (Charles Mingus, notamment), méprise (on crédite quelqu'un d'autre sur un enregistrement qu'il fait avec Charlie Parker), alcool, drogue, mariages ratés. En 1969, un producteur le reconnaît sous l'uniforme du groom de l'hôtel new-yorkais dans lequel il réside. Mais, à peine lui a-t-il fait
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