A la fois performance et mise en forme, la musique va rarement sans visée normative. Le polissage des sons vaut police et, restons poli, mise au pas (en cadence). Sur ce qu'est et doit être la musique, qui ne se croit compétent pour trancher ? Il est pourtant beaucoup plus amusant de se demander ce qu'elle peut être et comment, hors de toute référence à quoi que ce soit de déjà entendu. C'est le luxe, solitaire et intempestif, que s'offre Salvatore Sciarrino. Et la discographie de ce quinquagénaire italien, qui était l'un des invités du dernier Festival d'automne, permet de se faire de sa figure une idée assez précise. Elle ne ressemble à rien de connu. Aucune des grandes lignées qui composent la création contemporaine et leurs avatars et métissages postsériels, postrépétitifs, voire postconcrets, n'est repérable dans la musique de Sciarrino. Celle-ci donne l'idée d'une musique à l'état naissant, située à l'incertaine frontière du bruit et de sa transmutation, à la fois minimaliste et expressionniste, en sons délibérément organisés. Elle est souvent située aux frontières de l'inaudible, à la limite du silence presque total (et, forçant l'attention à rester en alerte, elle l'oblige à prendre conscience de la désolante pollution sonore dans laquelle baignent les plus calmes de nos moments : le vacarme d'un ordinateur, le martèlement d'une montre), mais elle est capable de rages tonitruantes, de perforations rudimentaires. Ces compositions sont élémentaires, au sens de la physi
Critique
Salvatore Sciarrino
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par Gérard DUPUY
publié le 28 avril 2001 à 0h37
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