Menu
Libération
Critique

A vau-l'eau

Article réservé aux abonnés
par
publié le 19 octobre 2001 à 1h18

Le spectacle se déroule tout entier dans la salle de bains et principalement dans la baignoire. Mais les voyeurs en seront pour leurs frais: question chair, il n'y a rien à mater dans Mil quinientos metros sobre el nivel del Jack, pièce de l'Argentin Federico León. D'ailleurs, les quatre acteurs ­ deux hommes, deux femmes ­ portent des combinaisons d'homme-grenouille ou des maillots de bain pas sexy du tout. Reste qu'une sacrée gêne s'installe chez les spectateurs de ce faux théâtre de l'intime. Immergée dans l'eau, la Mère évoque devant le Fils l'absence du père, «plongeur en haute mer». Survient un autre couple mère-fils, plus jeune, également confronté à l'absence du père. Cinquante minutes plus tard, la salle de bains, déjà très décrépite, est un bourbier où surnagent des cigarettes éventrées et des biscuits salés émiettés. Rien n'a fonctionné, pas plus les rapports humains que la télé qui grésille sur un tabouret. Ils ont eu beau crier, se battre, se mettre tous ensemble à la flotte, il ne reste rien que le spectacle d'un gâchis, la juxtaposition pitoyable de corps dégoulinants et transis. La pièce de Federico León manie la métaphore sans la moindre précaution, elle plonge dans une névrose familiale qui serait celle d'un pays tout entier. Elle est grotesque et formidable, désespérément absurde. Jamais l'expression «avoir la tête sous l'eau» n'a trouvé traduction plus terrible.

Théâtre de la Cité internationale. 21, boulevard Jourdan, 75014. «Mil quinientos metros sobre e