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Libération

Les statues font le trottoir

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publié le 1er mars 2002 à 22h27

On vient d'installer une statue de John Lennon dans un parc de La Havane, à Cuba. La grande île anti-yankee rend ainsi un hommage tardif à un Beatles, mais pas à n'importe lequel: au chantre baba et défunt de la contre-culture, à celui qui condamnait la politique militaire américaine. Dans les années 70 et 80, les Beatles, pourtant séparés, étaient quasiment interdits à Cuba: ils donnaient une image libre et anglo-saxonne de la jeunesse qui déplaisait au pouvoir. Sculpté dans le bronze et très ressemblant, Lennon est assis sur un banc, qui fait partie de l'oeuvre. Il a les genoux croisés, très cool, et son bras droit est allongé sur le dossier du banc. Une gerbe de glaïeuls est régulièrement glissée dans sa main gauche. On a déjà descellé et volé deux fois ses fausses lunettes: un flic surveille le mort nuit et jour. Les touristes de toutes nationalités, mais surtout des Américains, de plus en plus nombreux à visiter l'île, se font photographier en sa compagnie. Ils s'installent sur le banc, posent une main sur la cuisse de la star, qui les entoure de son bras. Sympa, non? Un vieil homme, assis à trois mètres dans l'ombre d'un arbre, fait chaque jour le compte des visiteurs. Il ne fait ça pour personne, par plaisir, sens de l'absurde, parce qu'il n'a rien d'autre à faire et pour une autre raison: il est fasciné par l'étrange familiarité de cette statue. Comme si Lennon allait brusquement se lever, avec ses potes touristes, pour rejoindre les plages de Varadero. A Dublin, un