Voeu pieux par temps de rengaine sécuritaire : chacun devrait lire le témoignage de Philippe Maurice, l’un des derniers condamnés à mort, aujourd’hui devenu un remarquable historien médiéviste, et libéré. La quatrième de couverture évoque «une formidable leçon de courage et d’espoir», mais le livre communique avant tout son énergie rageuse. Maurice est un homme qui, avant de dire oui, a dit non : non à un système pénitentiaire dont le seul objectif clair était de le tuer, puis de ne surtout pas le réinsérer. Le gamin de banlieue est devenu criminel par engrenage, et d’abord parce qu’il voulait aider son frère aîné à s’échapper de prison. Un soir de 1977, pris dans une fusillade, il tue un policier. Il a 20 ans et le voilà tueur de flic. Mitterrand le graciera. La suite est inadmissible dans un pays qui se prétend démocratique : le sadisme imbécile et la médiocrité des matons, l’hypocrisie de l’administration pénitentiaire, la lâcheté indifférente de la plupart des médecins, dont l’attitude face aux détenus, cette clientèle captive, rappelle celle des médecins aidant les tortionnaires pendant la guerre d’Algérie. Maurice a tout subi, l’isolement, les passages à tabac, les plats volontairement refroidis dans lesquels les gardiens crachent, les tracasseries pour l’empêcher d’étudier et de se reconstruire. Il ne doit d’en être sorti qu’à son puissant caractère, à son intelligence et à sa valeur morale. Combien d’autres sont devenus des monstres ou des déchets ?.
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