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Le passé recomposé de Charleston

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Aux Etats-Unis, la «capitale de l'esclavage» cultive son histoire : les habitants militent pour le sauvetage d'un vieux phare et redécouvrent un sous-marin, coulé en 1864. Mais, si les drapeaux confédérés ne flottent plus, le musée de l'esclavage reste, lui, à l'état de projet.
publié le 26 avril 2002 à 23h10

Charleston (Caroline-du-Sud) envoyé spécial

La barque à moteur glisse dans une brise tiède. Des pélicans passent au ras de l'eau. Le vieux phare de l'île Morris apparaît soudain, seul, fissuré, dans sa robe à bandes roses et blanches. On accoste la lagune déserte, nuage de sable à l'entrée de l'océan. La clef ouvre la porte. Seuls des mouettes et un hibou vivent là, laissant leurs traces sur l'escalier de fer rouillé. «On raconte qu'il y a aussi un fantôme», indique notre guide, Richard Beck, un dentiste membre de l'association Save the Light (Sauvons le phare). En 1885, la fille du gardien, le capitaine Wieking, s'invente un ami pour peupler sa solitude. Un jour, elle annonce à son père l'arrivée d'un terrible ouragan. «Qui te l'a dit ?», demande le père. «Mon ami», bredouille-t-elle. Le père consulte le baromètre et découvre qu'il vient de chuter violemment. «Mon ami dit qu'il faut se réfugier tout en bas du phare», poursuit la fillette. La famille suit le conseil. L'ouragan passe et tue 7 000 personnes à Charleston. Le père remercie sa fille, lui demande comment s'appelle son ami. «Le capitaine Mark», répond-elle. Le père blêmit : le capitaine Mark était son prédécesseur, mort en tombant de la lanterne...

Barbe-Noire. Le phare, jadis situé sur la terre ferme, ne fonctionne plus depuis quarante ans. La mer ronge patiemment sa base, avec la complicité des tarets, des vers marins des mers chaudes. Les eaux qui l'entourent sont chargées d'histoire. C'est ici que Barbe-Noire le