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Libération
Critique

L'animation mise en abyme

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publié le 7 juin 2002 à 23h52

Une femme s'affaisse, le visage tordu par la douleur, l'eau gicle du petit arrosoir rouge qu'elle tenait serré dans sa main. Cette séquence vidéo de quelques secondes est tirée du film Warshots, du réalisateur allemand Heiner Stadler, auquel le travail de Samuel Bianchini, Sniper, fait écho. L'artiste a repris certaines images et les a découpées en vingt-cinq parties. Sur l'écran morcelé, le spectateur découvre des bouts d'image saisis à différents moments de la chute. Mais il ignore encore le danger que court cette femme. Lorsqu'il effleure les fragments de sa souris, il dévoile la partie correspondante de l'image suivante et prend progressivement conscience du drame. La chute fractionnée, décomposée, d'une lenteur insoutenable, contraste avec le choc immédiat provoqué par la vidéo. Le spectateur dans la position du sniper «se voit progressivement responsabilisé de la situation et prend toute la mesure de ses gestes», explique Samuel Bianchini.

La manipulation est au coeur de la série des dispn, oeuvres interactives en ligne et sous forme d'installations : manipulation du spectateur par l'artiste et manipulation des images par le spectateur qui tient le rôle principal dans ces dispositifs. Dans Ta Garde, ce sont deux boxeurs qui se battent par images interposées ; en survolant le boxeur de gauche, le spectateur provoque une action du boxeur de droite, et vice versa. Même lorsque le joueur a compris la perverse mécanique, le déphasage entre le geste et le regard rend cet étra