Dans Thomas Mann et les siens, fiction documentaire diffusée en janvier dernier sur Arte, Heinrich Breloer avait habilement tricoté une chronique familiale en trois parties, de la république de Weimar à la chasse aux sorcières (1). Avec en narratrice principale Elisabeth Mann-Borgese, la benjamine des enfants Mann, décédée depuis. Fuir pour vivre s'attache à l'histoire de Klaus et Erika Mann et emprunte son titre au premier opus écrit à quatre mains par le frère et la soeur, inséparables depuis l'enfance, qui ont lutté toute leur vie pour se libérer de la figure du père.
Le docu-fiction d'Andrea Weiss et Wieland Speck elle est new-yorkaise, il est berlinois utilise exactement les mêmes ingrédients : reconstitutions, images d'archive, extraits de films et entretien avec Elisabeth Mann. Sauf que c'est là complètement raté. A telle point que l'on a l'impression que le montage s'est décidé par mail au-dessus de l'Atlantique. Même en ayant en mémoire la saga de Breloer, on ne comprend pas grand-chose à un docu-fiction embrouillé qui hésite entre la biographie télévisée classique et le vidéo-club gay. A force de vouloir tirer tous les fils de personnalités aussi riches que celles de Klaus et d'Erika, acteurs, écrivains, homosexuels et farouches opposants du régime nazi, les auteurs finissent par laisser le téléspectateur au bord de la route de l'exil américain des aînés Mann. On retiendra les extraits du film du Méphisto d'Istvan Szabo (1981), basé sur le livre autobiographique